7 septembre 2022
https://www.openedition.org/12554 , info:eu-repo/semantics/restrictedAccess
Yerri Urban, « La nationalité dans le second Empire colonial français », Institut de recherche sur le Maghreb contemporain, ID : 10.4000/books.irmc.2648
Durant un court siècle (1865-1955), le droit de la nationalité française ne se résuma pas à la distinction entre nationaux et étrangers : il comportait trois catégories, le Français, l’étranger et l’indigène, auxquelles pouvait s’ajouter, dans de nombreux territoires, une quatrième, l’étranger assimilé à l’indigène. Dans son Empire, la France choisit ainsi de superposer à la différenciation territoriale entre l’Etat métropolitain et les possessions une différenciation en matière de nationalité entre le peuple métropolitain et les originaires des possessions. Elle dut alors élaborer un droit pour ces derniers. Son histoire, soumise aux contraintes du concept juridique et politique de civilisation, du régime législatif, de la conception de la nationalité du Code civil de 1804 et de la situation géographique et géopolitique, résulta de dynamiques multiples et constantes. Ce droit vit ses principes posés en 1865 : expression d’un compromis entre mission civilisatrice et principe des nationalités, il devait permettre à l’indigène de s’assimiler à la nation française par le biais d’une naturalisation, conçue comme une « conversion à la civilisation ». Toutefois la naturalisation se fit progressivement, régie par des textes de plus en plus sélectifs, visant à la francisation des seules élites. Si, dans la plupart des possessions, aucun texte ne définissait l’indigène, il en fut autrement en Indochine : il a longtemps été perçu en termes ethniques-raciaux et, dans les années 1930, les dispositions les plus complètes furent adoptées, marquées par la focalisation sur la question du métissage. Ce droit dépérit progressivement par la suite.