Dire la norme en temps de crise

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29 novembre 2021

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Dans les registres de délibérations du conseil de ville, conservés pour les années 1374-1388 et 1414-1440, les « statuts » toulousains ne sont jamais nommés statuta, mais privilegia et libertates. Ces privilèges concédés par le pouvoir, surtout royal, forment l’essentiel du droit de la ville et se placent au cœur de son identité. Ils se distinguent des ordinationes, qui, dans ces mêmes registres, désignent des normes à la fois plus provisoires et contestables, qu’elles émanent des pouvoirs municipaux ou royaux. Les mentions des privilegia/libertates sont plutôt rares dans les registres de délibérations (une dizaine). Cela tient surtout à la nature de ces documents, qui répondent à des situations d’urgence (guerre, levée d’impôt) qui ne peuvent guère être réglées par un privilège. Afin de légitimer son action, le conseil de ville recourt plus souvent aux ordinationes, des textes plus malléables, ainsi qu’au consensus des avis exprimés en son sein. Les rares mentions de privilèges se placent dans un contexte de crise politique, où Toulouse joue des concurrences entre les pouvoirs pour maintenir ses droits et en acquérir de nouveaux. Mais en préférant privilegia/libertates à statuta, la ville abandonne une rhétorique qui promouvait l’indépendance du jus proprium de la ville au moment de l’apogée du pouvoir communal (mi-xiie-début xiiie siècles) ; elle adopte un formulaire soulignant mieux sa dépendance à l’égard du pouvoir royal, qui dispense les privilèges en vertu de son pouvoir gracieux. Ces mentions sont ainsi révélatrices des limites de l’autonomie juridique de la municipalité.

In the registers of deliberations of the City Council, preserved for the years 1374 to 1388 and 1414 to 1440, the “statuts” of the city of Toulouse are never referred to as statuta but as privilegia et libertates. These privileges, essentially granted by royal power, constitute the main part of the city law, and happen to be at the core of its identity. They differentiate themselves from ordinationes which, in these same registers, refer to norms both more temporary and disputable and which emanate from royal or municipal authorities. Mentions of privilegia/libertates seldom appear in the registers of deliberations (about ten occurrences). This stems from the very nature of these documents, which actually respond to emergencies (warfare, tax raising) that can hardly be resolved through the granting of any privileges. To legitimate its actions, the City Council most frequently uses ordinationes, which are more malleable texts, but also tries to reach a form of consensus between the different opinions within it. The occasional mentions of privileges occur in a context of political crisis, in which Toulouse makes use of the competition between the different spheres of power to uphold its rights and establish new ones. However, while supporting privilegia/libertates over statuta, the city lets go of a form of rhetoric which promoted independence of the jus proprium of the city at the apex of communal power (mid 12th, early 13th century); it takes on a form which better emphasizes its dependency towards royal power, which grants privileges by virtue of its gracious power. These mentions are thus indicative of the limits of the town’s legal autonomy.

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