8 août 2018
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Marcel Rioux, « Jeunesse et société contemporaine », Presses de l’Université de Montréal, ID : 10.4000/books.pum.21971
Selon Rioux, la jeunesse des années 1960, mue par un mouvement de contestation ouverte, remet moins en question les « contradictions économiques » du capitalisme génératrices d’inégalités sociales que ses « contradictions culturelles ». En effet, l’époque amène les jeunes à mettre en cause non seulement l’exploitation économique et la domination politique surgies de l’industrialisation observée sur le vif par Marx, mais l’aliénation de la vie individuelle et collective dans le rayon de l’économie capitaliste. La jeunesse attire donc l’attention de la « sociologie engagée » qu’orchestre Rioux sur le plan théorique, en négligeant toutefois les enquêtes de terrain susceptibles de lui donner son éclat. Sous l’égide de la théorie, la jeunesse se voit hâtivement attribuer le statut d’« acteur », voire de « sujet historique » sans démonstration digne de ce nom. La jeunesse se conçoit donc en théorie comme une « classe sociale » et non comme une « catégorie sociale », notion à laquelle on associe d’emblée les jeunes. Selon Léon Bernier, la réflexion de Rioux s’inspire manifestement de Karl Mannheim qui envisage la jeunesse comme une « génération » du fait que « l’appartenance à la même classe et l’appartenance à la même génération ou [au même] groupe d’âge ont ceci en commun que les deux reposent sur le fait pour les individus de vivre dans un certain cadre social et historique qui délimite un champ particulier d’expériences pouvant influencer leur vision du monde et leurs prédispositions à l’action ». Ce texte a donné corps à la conférence inaugurale que Rioux a prononcée le 11 mars 1965, lors de sa nomination comme professeur titulaire.