25 mars 2022
https://www.openedition.org/12554 , info:eu-repo/semantics/openAccess
Kathryn E. Piquette, « Documenting Early Egyptian Imagery », Presses universitaires de Provence, ID : 10.4000/books.pup.41065
Lorsque l’on essaie de donner du sens aux marques intentionnelles de la culture matérielle pré et proto-dynastique, l’attention se focalise à différencier les fonctions iconographiques de celles qui relèvent de la sémantique et à résoudre les significations symboliques. Le fait de classifier une marque ou un ensemble de marques en accord avec des catégories de signes ou de symboles souvent dérivées de conventions anachroniques a conduit à négliger tout un ensemble d’autres champs de la production mentale ancienne. L’un de ces aspects est la pratique matérielle, en incluant ses facettes technologiques. Cet article prend comme point de départ la prémisse que la pensée ne se cantonne pas à la morphologie des signes graphiques mais réside aussi dans les matériaux et les techniques déployés dans son expression. Ceci vise également à prendre en compte le paradoxe qui est que l’archéologue s’intéresse avant tout aux transformations de la technologie et qu’en tant que chercheurs nous avons négligé de considérer les effets des technologies que nous utilisons à l’heure actuelle sur la documentation et l’étude des technologies du passé. Avant de le faire, je voudrais démontrer combien nous avons besoin de rematérialiser notre conception de la culture graphique de l’Égypte pré-pharaonique pour que nous puissions ensuite la considérer comme une part de la pratique technologique ancienne. En faisant cela, j’emprunte aux concepts théoriques de la matérialité, de la pratique technologique et à la phénoménologie les schèmes qu’ils fournissent pour explorer les plus anciennes attestations graphiques à la fois comme processus et résultat de l’incorporalité sensorielle et de la pratique technologique. En ce qui concerne la technologie contemporaine telle qu’elle est utilisée par la recherche, différents défis attendent le questionnement sur les fins détails matériels des marques de surface et des formes similaires. La prise de vue et l’étude, en utilisant la photographie conventionnelle, le dessin archéologique ou d’autres méthodes d’imagerie, sont par essence sélectifs et de cela peut résulter des omissions et des erreurs. Une étude de première-main n’est pas toujours possible et, surtout, des détails de surface peuvent être difficiles à discerner. Les technologies digitales avancées ont une position unique pour répondre à de tels défis et présentent un potentiel prometteur pour apporter à ces sujets à la fois des avancées matérielles, méthodologiques et théoriques. La Reflectance Transformation Imaging (RTI) rend possible une haute résolution et une prise de vue de détail de la surface de l’objet et de ses particularités. Déjà utilisée avec succès pour toute une série de documents et d’objets archéologiques, la RTI n’est exploitée que depuis peu pour l’étude de la culture graphique de l’Égypte protodynastique. Je voudrais présenter deux cas d’étude de la RTI : la palette dite du Champ de Bataille ou Palette du Lion et une étiquette funéraire inscrite, en ivoire. Il s’agit du résultat d’un projet de collaboration entre l’Université de Southampton et l’Université d’Oxford, Reflectance Transformation Imaging Systems for Ancient Documentary Artefacts (RTISAD), fondé par le AHRC Digital Equipment and Database Enhancement for Impact scheme (DEDEFI). Au travers de ces exemples, je souhaiterais montrer l’intérêt de prendre en compte la techno-matérialité des marques graphiques et démontrer le formidable potentiel offert par la RTI pour documenter, visualiser et étudier la plus ancienne tradition graphique égyptienne et ses développements.