Histoire du Peloton de Gendarmerie de Haute-Montagne de Briançon et de ses secours en montagne au cours des trente dernières années

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15 janvier 2021

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Gilles Chardon, « Histoire du Peloton de Gendarmerie de Haute-Montagne de Briançon et de ses secours en montagne au cours des trente dernières années », Presses universitaires de Perpignan, ID : 10.4000/books.pupvd.11433


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Médecin des armées, le commandant CHARDON étudie dans ce travail un site naturel dont l’utilisation régulière comme cadre de vie est récente : la très-haute montagne du Briançonnais. Caractérisée par les pics englacés, les pentes de rochers à nu, les caprices météorologiques et la consistance très contrastée du substrat minéral, cette zone d’altitude fut longtemps évitée par les montagnards traditionnels. En dehors de quelques bergers téméraires ou de quelques cultivateurs aventureux, cette zone élevée était marquée par les connotations maléfiques qui affublaient les sommets dans les sociétés anciennes. Cette configuration routinière change vers 1780, avec les premières expéditions aristocratiques sur les hauteurs alpines. En 1779, le géologue genevois Horace Bénédict de Saussure publie ses célèbres « Voyages dans les Alpes ». Cet auteur est connu pour ses randonnées dans les Alpes, le Jura et les Vosges. En 1787, il atteint le sommet du Mont-Blanc, un an après les premiers conquérants de la cime alpestre : le docteur Michel Paccard et le cristallier Jacques Balmat. En 1787, Horace Bénédict de Saussure emmène avec lui dix-neuf personnes, qui versent chacune cinq louis pour l’excursion : c’est ainsi que naît l’activité touristique sur les grandes hauteurs, mais ce loisir demeure l’apanage d’une petite élite amoureuse du risque. Quoi qu’il en soit, vers 1800, l’arrivée de cette clientèle extérieure entraîne les débuts du secours en montagne, qui est d’abord orchestré par des sociétés d’alpinistes bénévoles. En Briançonnais, l’assistance aux randonneurs malheureux est assurée par la Société Dauphinoise de Secours en Montagne. Ce groupement conduit l’essentiel des missions de sauvetage jusqu’ en 1958. Après la Libération cependant, la vogue de l’alpinisme est telle que le secourisme amateur ne suffit plus pour répondre aux appels de détresse. Durant l’hiver 1956-1957, les alpinistes Henri et Vincendon meurent d’hypothermie alors qu’ils sont bloqués sur un replat d’altitude. Faute d’hélicoptère adéquat, les secours les récupèrent trop tard pour les arracher au décès. À partir de là, les autorités réagissent. En 1958, l’État crée les Pelotons de Gendarmerie de Haute-Montagne, des unités qui accueillent des gendarmes d’élite, qui les surentraînent, et qui les dotent d’hélicoptères Alouette III. En 1968, ce type d’appareil est remplacé par un outil encore plus performant : l’Alouette III-SA 319 B, qui est produite jusqu’en 1977. Depuis 1979, les Alouette III sont maintenues en service grâce à un maintenance soignée. De fait, il est difficile de trouver un engin mieux adapté aux vents de parois, aux micro turbulences de montagne, aux sautes de temps et aux inversions de température. Vers 2005, l’Eurocopter 145 à double turbine devrait néanmoins prendre le relais. En phase de rodage entre 1958 et 1970, le P.G.H.M. de Briançon fonctionne dans une ambiance de professionnalisme maîtrisé. C’est ainsi que les pilotes d’hélicoptères savent éliminer le stress de leur mental, en répétant en boucle les paramètres de leur vol, lorsque les conditions deviennent très incertaines. Pourtant, le risque est omniprésent : en 1999, un équipage est mort d’hypothermie sur le Pic de Bure, après avoir heurté le sol. L’appareil étant dépourvu de G.P.S. ou de balise Argos, la localisation des accidentés a été trop longue. Dangereux, le secours héliporté en haute-montagne s’avère très productif. Progressivement, il a réduit la courbe des décès, cela alors même que la fréquentation sommitale augmentait. À la fin du XXe siècle en effet, les loisirs du risque et de l’extrême ont élargi leur audience. Alors que l’économie européenne se tertiarisait en développant les marchés de l’agrément, des amateurs de nature et de sensations fortes fuyaient la massification des sports d’hiver et des promenades en moyenne-montagne. À partir de là, l’image du héros dominateur de nature a été étendue à toute une gamme de sports nouveaux, comme le parapente, le canyonning, les raquettes, le ski court d’été, le surf en poudreuse vierge, l’ascension de colonnes glacées au piolet, ou la descente de séracs friables. Simultanément, la séparation entre les saisons a été estompée : la randonnée d’été s’est étendue vers décembre, les activités liées à la neige ou à la glace ont perduré jusqu’en août. La haute-montagne est ainsi devenue un cadre de vie à fréquentation régulière et croissante. En Briançonnais, la mutation a façonné deux pics de risque : celui des orages d’automne et celui des brumes de printemps. Avec le développement des ouvrages autoroutiers et des accès de T.G.V. dans les Alpes, la fréquentation de la haute-montagne briançonnaise ne peut que croître, d’autant que l’Europe communautaire s’élargit. Fort d’un tel constat, le commandant CHARDON a regroupé toutes les données que le P.G.H.M. de Briançon a conservées au sujet de ses interventions. Après traitement informatique, le commandant a produit une cartographie accidentologique de sa région, et il a établi une statistique des malaises, des lésions ou des cas létaux qui motivaient les sorties. De la sorte, l’étude historique est devenue un support pour le ciblage des efforts dans les missions futures : voici donc un bel exemple d’articulation entre l’érudition et la médicalisation du malheur.

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