La mise en valeur de l’équipement thermal pyrénéen du Second Empire à la crise des années trente : l’hygiénisme au service d’une nouvelle économie montagnarde

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15 janvier 2021

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Christophe Bouneau, « La mise en valeur de l’équipement thermal pyrénéen du Second Empire à la crise des années trente : l’hygiénisme au service d’une nouvelle économie montagnarde », Presses universitaires de Perpignan, ID : 10.4000/books.pupvd.11518


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À partir de 1750, la station de Bagnères-de-Bigorre ouvre la voie du tourisme pyrénéen sur le versant français. Elle accueille des aristocrates et des militaires qui viennent chercher le repos au bon air, la thérapeutique thermale et les mondanités pittoresques. Portée par les débuts du préromantisme, la mode littéraire des « Voyages aux Pyrénées » stimule les débuts de cette fréquentation touristique. C’est ainsi que les Pyrénées-centrales développent leurs premières stations thermales, dans un imaginaire qui conjugue les bains de jouvence, le climatisme régénérateur et la distinction sociale. Entre 1751 et 1767, pour répondre à cette demande initiatrice, l’intendant d’Etigny amorce la construction d’une rocade carrossable, entre Toulouse et Bagnères, via Tarbes et Pau. Les intendants qui succèdent à d’Etigny dans la généralité d’Auch poursuivent ce chantier, et ils le complètent en faisant commencer une route en balcon par le col de Peyresourde, dans le but de relier Bagnères-de-Luchon et Bagnères-de-Bigorre par les hauteurs. Après avoir pris un tour plus militaire sous le Premier Empire, le thermalisme pyrénéen enregistre une extension de sa dimension mondaine sous la Monarchie de Juillet. Dédiée à la reine Marie-Amélie, la nouvelle station d’Amélie-les-Bains soigne les combattants d’Algérie, mais elle accueille aussi la haute société, laquelle plébiscite au même moment les qualités climatiques de la ville de Pau. Sous le Second Empire, la fonction thermale sort de ses isolats, pour imbiber progressivement l’ensemble du versant français. Député de Tarbes et Ministre d’Etat, Achille Fould fait ouvrir la « route thermale des grands cols », entre Luchon et les vallées d’Ossau ou d’Aspe. Long de deux cents kilomètres, l’itinéraire emprunte le Soulor, l’Aubisque, Peyresourde et le Tourmalet. Cette voie monumentale est inaugurée en 1867, et elle sert à fournir un belvédère pour les excursionnistes de l’été. Sous le Second Empire en effet, les promoteurs de stations cherchent à provoquer une synergie entre les lieux de villégiature : les touristes de haut-rang sont invités à musarder à l’intérieur de la chaîne, pour éviter l’ennui et pour distribuer les bienfaits de leurs dépenses. La communication de Christophe BOUNEAU explique que la construction des chemins de fer est venue à point pour encourager ce désir de complémentarité. Le ferroviaire n’a pas réellement créé les stations thermales ex-nihilo, comme il a pu le faire dans le secteur balnéaire. Il a surdimensionné d’emblée la clientèle des stations qu’il atteignait les premières, il a donné un rayonnement aux petites localités thermales qui souffraient d’enclavement, il a incité les clients à combiner les séjours au sein d’une même saison. De ce point de vue, Napoléon III et Eugénie donnaient l’exemple, en « naviguant » entre les stations de la Côte d’Argent et les Pyrénées-Occidentales. Dans les Pyrénées, le chemin de fer arrive d’abord par des antennes qui prolongent les grandes radiales nord-sud. Dax est atteinte la première en 1864. Suivent ensuite Bagnères-de-Bigorre (1862), Bayonne (1871) et Luchon (1873). Simultanément, en 1867, la rocade Toulouse-Bayonne par Tarbes et Pau est achevée. Ensuite, le réseau est progressivement étoffé dans le cadre du plan Freycinet : celui-ci donne lieu à deux vagues de constructions, la première durant la décennie 1880 (Le Boulou), la seconde pendant les années 1890 (Amélie-les-Bains et Vernet-les-Bains). La densification est souvent complétée par des tramways ou des chemins de fer à voie étroite, pour lesquels interviennent des sociétés locales, avec ou sans l’aide de la Compagnie du Midi. À la veille de 1914, pour attirer la haute-société internationale, le nouveau maillage thermal est placé en correspondance avec les horaires des grands express de luxe : le Pyrénées-Côte d’Argent à l’ouest ; le Pyrénées-Express au centre et le Barcelone-Express à l’est. En outre, pour satisfaire les classes aristocratiques, le thermalisme mise sur la « Fée électricité », tant pour l’urbanisme que pour le confort hôtelier ou la traction ferroviaire. C’est ainsi que sont inaugurés le Pierrefitte-Cauterets-Luz (1898), le Train jaune Vernet-Bourg-Madame (1911), le Luchon-Grand Hôtel de Superbagnères (1913). Le développement du tourisme thermal de grande classe profite aux Pyrénées en trois étapes successives : la Grande Expansion de 1852-1865, la Nouvelle Expansion de 1896-1914 et la Grande Prospérité de 1924-29. Entre 1910 et 1920, les économistes nationalistes et les militaires travaillent à un projet qui vise à capter vers les Pyrénées une partie des curistes attachés aux stations allemandes. 1914 marque un sommet dans cette atmosphère euphorique, avec une profusion de livres-guides, d’albums et d’affiches ferroviaires. Toute une culture à l’eau de rose popularise ainsi le thermalisme pyrénéen, dont la fréquentation demeure pourtant très élitiste. La guerre de 1914 détruit largement cette ambivalence : elle déstabilise indirectement la Péninsule ibérique, et elle raréfie la clientèle espagnole. La crise de 1929 suscite ensuite un effondrement. Cette récession n’est compensée qu’après 1945, avec les bienfaits français de la Sécurité sociale.

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