13 septembre 2018
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Étienne Kippelen, « L’humour dans la musique française de 1870 à 1913 : entre exorcisme et hédonisme », Presses universitaires de Rennes, ID : 10.4000/books.pur.62026
À écouter certains compositeurs, il règne encore aujourd’hui un tabou particulièrement vivace au sujet de l’humour musical, conduisant à mésestimer les productions provoquant le sourire, comme si la musique, art du tragique par excellence, ne saurait raisonnablement incliner à l’humour, sous peine de perdre son âme. Pourtant, des années 1870 à 1913, la création des Chabrier, Saint-Saëns, Debussy et autres Satie a souvent dérivé vers des pages légères ou parodiques, parfois justifiées par une évocation attendrie de l’innocence enfantine. Des Souvenirs de Bayreuth de Fauré et de Messager, ravalant la chevauchée des Walkyries à un simple quadrille, au Docteur Gradus ad Parnassum de Debussy, moquant Clementi, en passant par les calembours d’Españaña de Satie, tous ces humours, aux enjeux néanmoins différents, tentent d’exorciser la défaite de 1870. Dans un contexte où les haines religieuses et les conflits sociaux s’exacerbent à l’aune d’un nationalisme revanchard, la mécanique détraquée de la caricature et du comique sonne comme un refus pour le monde musical d’abonder la tragédie qui se noue, en même temps qu’elle amuse un public bourgeois en quête de divertissement.