5 juillet 2019
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Klaas Tindemans, « « The Cruellest Month » : la représentation théâtrale de la cruauté, de la Saint-Barthélemy (1572) au Rwanda (1994) », Presses universitaires de Rennes, ID : 10.4000/books.pur.78009
L’événement politique le plus chargé de cruauté des deux dernières décennies est sans conteste le génocide rwandais. Les massacres, perpétrés sous l’œil hagard et couard de la communauté soi-disant « internationale », ont largement démontré l’inanité d’une approche globalisante des droits de l’homme. Ces événements affectent par ailleurs l’idée même de représentation de la violence. Le génocide rwandais est le sujet de deux productions théâtrales « documentaires » importantes : Rwanda 94 de Jacques Delcuvellerie et Le Groupov (Belgique, 1999) et Rwanda Revisited de Hans-Werner Kroesinger (Allemagne, 2009).Cet article commence à l’intersection de deux hypothèses historiques et philosophiques : 1./ La rhétorique et le théâtre de la première Modernité sont la sublimation de la violence réelle des pratiques juridiques médiévales (Jody Enders) et 2./ La représentation théâtrale de la violence excessive constitue la condition nécessaire pour le développement du discours juridico-politique de la modernité (Anthony Kubiak). C’est au prisme de la « tragédie sanglante » – l’équivalent français de la revenge tragedy élisabéthaine – que j’examine ces productions théâtrales récentes. Ces deux dispositifs dramatiques – la tragédie sanglante et les pièces sur le Rwanda – mettent en question les éléments constitutifs d’une psyché collective et invitent à reconsidérer l’hypothèse de Kubiak selon laquelle la Loi – sur son double versant politique et psychique – est fondée sur la représentation d’une violence excessive.