28 août 2018
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Myriam Dufour-Maître, « L’éloquence féminine dans la première moitié du XVIIe siècle : des codes éducatifs aux modèles littéraires », Presses universitaires de Rouen et du Havre, ID : 10.4000/books.purh.1725
La tradition antique n’envisage guère que les femmes, sauf rarissimes exceptions, accèdent à l’èthos, cette conjonction désirable de l’excellence rhétorique et de l’excellence morale. À l’issue des guerres de religion en France, émerge au contraire un art de la conversation dans lequel les femmes trouvent place et même prééminence. Cette « instance du féminin », qui domine désormais la civilisation des mœurs, conduit à envisager une éducation des femmes et des jeunes filles aux habitudes de parole qu’on juge susceptibles de polir les cavaliers et de construire la paix civile. Se pose alors la question du lieu de cette éducation (la cour, la ruelle ou l’école ?), de ses formes et de ses contenus : faut-il, pour former le sexe féminin à cet art de dire doux et enjoué, les préceptes de la rhétorique, ou au contraire, tout l’art caché des fictions vraisemblables que proposent le théâtre, voire le roman ? Ou bien l’amour est-il la véritable « école des femmes », et la seule qui garantisse la conservation en elles d’une excellence linguistique supposée naturelle ? Les querelles littéraires qui jalonnent le XVIIe siècle, dont celle du Cid, témoignent ainsi de la difficulté à envisager une véritable éducation féminine à la parole, du moins par les moyens nouveaux qu’offre aux garçons la promotion de la littérature.