20 décembre 2019
https://www.openedition.org/12554 , info:eu-repo/semantics/openAccess
Laurent Joly, « La Revue critique des idées et des livres. Première dissidence d’Action française ou première génération intellectuelle de « maurrassiens » indépendants ? (avril 1908 – février 1914) », Presses universitaires du Septentrion, ID : 10.4000/books.septentrion.44379
L’histoire de la Revue critique des idées et des livres, modestement lancée en avril 1908, est attachée aux deux années précédant la Grande Guerre, qui signent le succès et la reconnaissance symbolique d’une revue alors luxueusement éditée, tirant à plus de 3000 exemplaires, qui s’impose comme l’organe officiel du néo-classicisme et la seule rivale de la NRF : plusieurs numéros spéciaux font date, notamment un « Stendhal » en mars 1913, qui marque le début des études stendhaliennes en France. Ce succès vient consacrer le travail d’un groupe de jeunes intellectuels réunis par la fréquentation du salon de la comtesse de Courville, la célèbre et influente amie de Barrès et Maurras, et soudés derrière leur directeur Jean Rivain. Nés au milieu des années 1880, Gilbert, Clouard, Longnon ou Marsan appartiennent à la première génération des disciples formés par Maurras, la première à le considérer comme un « Maître »… et la première à se séparer de l’Action française.Cette première (et méconnue) « dissidence » met en jeu un classique affrontement de générations et toute une série de luttes d’ambition internes aux jeunes maurrassiens. Jusqu’en 1910, la RCIL est tenue par le groupe de Georges Valois et de ses amis, qui tente de faire de la revue la tribune du rapprochement entre antidémocrates de gauche et de droite… À partir de 1911, Rivain reprend la main sur la RCIL, avec le dessein d’en faire une revue de haute tenue littéraire et intellectuelle. Les prétextes politiques et philosophiques mis en avant par Maurras au moment de la rupture de février 1914 (Stendhal, la défense de Bergson) cachaient cet affrontement de personnes et une hostilité de plus en plus irrémédiable à l’égard d’un jeune homme riche, arrogant et jalousé, dont les succès semblaient autoriser la prise de liberté avec la « ligne du parti » et faisaient ombrage à la vieille revue grise fondée par Vaugeois…