Le narrateur cinématographique implicite

Résumé Fr En

Dans cet article, il est question des fondements du récit cinématographique. Contre une thèse endossée par des théoriciens du cinéma français (Metz, Oudart) aussi bien que des philosophes américains (Levinson, Chatman), je défends qu’il n’existe pas de narrateur cinématographique implicite. Pour ce faire, je montre que l’argument a priori, d’après lequel la notion même de récit cinématographique implique qu’il y ait dans tout film, même implicitement, un narrateur, est erroné. En me reposant sur Gaut, j’avance que le postulat d’un narrateur implicite conduit à une conception absurde de l’expérience du spectateur. Je conclus qu’il convient d’abandonner ce platonisme à l’égard du récit cinématographique, pour lui préférer, suivant une remarque de Bordwell, un nominalisme.

This paper deals with the foundations of cinematographic narration. Contrary to a view quite commonly shared among French film theorists (Metz, Oudart) as well as American philosophers (Levinson, Chatman), I argue that there is no such thing as an implicit cinematographic narrator. To do so, I reject the a priori argument according to which the very notion of narration implies that for every film, there is at least an implicit narrator. Following Gaut, I argue that the assumption implies an absurd description of the viewer’s experience. So, we should give up on the platonist postulate of such an impalpable entity and, in accordance with some early remarks by Bordwell, move toward a nominalist conception of cinematographic narration.