Une justice rendue sous silence : juger les collaborateurs des nazis en Pologne dans les années 1950 et 1960

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3 avril 2023

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Utilisé pour juger les auteurs de crimes nazis et leurs collaborateurs locaux, mais aussi comme outil politique contre les opposants, le décret d'août 1944 disparaît presque après le dégel de 1956 : il ne peut être appliqué que lorsque la participation directe au meurtre est prouvée. Le nombre de procès et de condamnations a ensuite diminué. Pourtant, les dossiers de la Commission principale chargée de poursuivre les crimes allemands en Pologne contiennent au moins 130 affaires ouvertes jusqu'en 1970. Tous les accusés revendiquent la citoyenneté polonaise, et la plupart ont été enrôlés pendant la guerre dans la police locale sous tutelle allemande ou comme membres de l'administration civile (maires de comté, intendants d'approvisionnement...). Contrairement aux procès des auteurs de crimes nazis, les procès ultérieurs des collaborateurs ont généralement été très peu médiatisés. Néanmoins, ils révèlent l'évolution du récit judiciaire sur la collaboration locale pendant l'Holocauste dans les années 1960, tout en soulignant l'intense circulation de l'information au sein du bloc de l'Est (de nombreux procès portaient sur des crimes commis dans des territoires aujourd'hui situés en URSS) et parfois aussi avec l'Ouest. Mon article se concentrera sur un procès spécifique, qui a impliqué la participation directe de survivants juifs qui ont pris l'initiative de venir témoigner en personne ou par le biais de lettres provenant des États-Unis ou d'Israël, contre le chef de la police locale de Braslaw, une ville frontalière de la Biélorussie soviétique d'après-guerre. Ce procès inhabituel et non médiatique, qui s'est terminé après la campagne antisémite de 1968, met en lumière l'action des victimes, leurs liens transnationaux, mais aussi les débats politiques internes sur la manière d'intégrer l'histoire de la collaboration locale dans le récit officiel de la Seconde Guerre mondiale.

Used to judge Nazi perpetrators and their local collaborators but also as a political tool against opponents, the August decree of 1944 almost vanished after the 1956 Thaw: it could only be implemented when direct participation in murder was proved. The number of trials and condemnations subsequently dropped. Yet the files of the Main Commission for the Prosecution of German Crimes in Poland hold at least 130 cases opened until 1970. All of the accused claimed Polish citizenship, and most had been enrolled during the war in the local police under German supervision or as members of the civil administration (county mayors, supply intendants…). Contrary to the trials of Nazi perpetrators, those later trials of collaborators were usually very scarcely publicized. Nevertheless, they reveal the evolving judicial narrative on local collaboration during the Holocaust in the 1960s, while pointing at the intense circulations of information within the Eastern bloc (many trials dealt with crimes committed in territories now located in the USSR) and at times also with the West. My paper will focus on one specific trial, which involved the direct participation of Jewish survivors who initiated and came to testify in person or through letters from the USA or Israel, against the chief member of the local police of Braslaw, a border town in postwar Soviet Belarus. This unusual and non-mediatic trial, that ended after the 1968 antisemitic campaign, sheds light on the agency of the victims, their transnational links but also on the internal political debates about how to fit the story of local collaboration within the official narrative on the Second World War.

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