Être activiste à l’ère du numérique au Cameroun : entre logiques de visibilisation des causes sociales, luttes de visibilité de soi et stratégies d’accumulation

Résumé Fr En Es

Le Cameroun est un pays où les médias ont longtemps évolué dans un régime de la censure (Atenga, 2007). Les choses ont changé à partir de 1990, avec la libéralisation du système politique. Celle-ci va progressivement conduire à l’ouverture de l’espace médiatique. Bénéficiant des premières connexions au réseau Internet, depuis avril 1997 (Tamokwe Piaptie, 2013), l’espace social numérique camerounais est devenu aujourd’hui une véritable plateforme de redéploiement du travail d’activisme politique. Désormais, les « laissés-pour-compte » d’hier, restés longtemps dépourvu de parole, peuvent s’exprimer à leur guise sans risque d’être interrompus grâce aux facilités que leur donnent les plateformes numériques. Cet état de chose suscite une curiosité intellectuelle relativement aux conditions de déploiement de ces « nouveaux leaders d’opinion ». Ainsi, cette réflexion qui s’inscrit dans le cadre des interrogations sur le rôle des technologies avancées dans la structuration du travail d’activisme au Cameroun se veut une contribution à la sociologie des réseaux sociaux numériques. Par une démarche conciliant méthode qualitative (observation directe et analyse documentaire) et les digitals methods (sources d’information basée sur des traces numériques), nous démontrons que l’activisme numérique s’appréhende comme une activité complexe, structurée par des contraintes liées à l’intensification de la visibilisation des problèmes sociaux, la course à la visibilité de soi ou au célébrisme, et la recherche des moyens de subsistance.

Cameroun is a country where the media have evolved under a regime of censorship (Atenga, 2007). Things changed since 1990 with the liberalisation of the political system. This gradually opened up the media. With the first connections to the Internet in April 1997 (Tamokwe Piaptie, 2013), Cameroon’s digital social space has become a genuine platform for the redeployment of political activism. Henceforth, the « left-behind » of the past, speechless for a long time, can express themselves as they please, without the risk of being interrupted, thanks to the facilities provided by digital platforms. This situation is arousing intellectual curiosity about the conditions under which these « new opinion leaders » are being deployed. This study, which is part of a series of questions on the role of advanced technologies in structuring activism in Cameroon, is a contribution to the sociology of digital social networks. Using an approach that combines qualitative methods (direct observation and documentary analysis) and digital methods (sources of information based on digital traces), we show that digital activism can be understood as a complex activity, structured by constraints linked to the intensification of the visibility of social problems, the race for self-visibility or celebrity, and the search for means of subsistence.

Camerún es un país en el que los medios de comunicación han evolucionado bajo un régimen de censura (Atenga, 2007). Las cosas cambiaron en 1990, con la liberalización del sistema político. Esto abrió gradualmente los medios de comunicación. Con las primeras conexiones a Internet en abril de 1997 (Tamokwe Piaptie, 2013), el espacio social digital camerunés se ha convertido en una auténtica plataforma para el redespliegue del activismo político. A partir de ahora, los "rezagados" del pasado, sin discurso durante mucho tiempo en la clandestinidad, pueden expresarse a su antojo sin riesgo de ser interrumpidos gracias a las facilidades que ofrecen las plataformas digitales. Este estado de cosas despierta la curiosidad intelectual sobre las condiciones en que se despliegan estos "nuevos líderes de opinión". Este estudio, que forma parte de una serie de preguntas sobre el papel de las tecnologías avanzadas en la estructuración del activismo en Camerún, pretende ser una contribución a la sociología de las redes sociales digitales. Mediante un enfoque que combina métodos cualitativos (observación directa y análisis documental) y métodos digitales (fuentes de información basadas en rastros digitales), mostramos que el activismo digital puede entenderse como una actividad compleja, estructurada por condicionantes vinculados a la intensificación de la visibilidad de los problemas sociales, la carrera por la autovisibilidad o la celebridad, y la búsqueda de medios de subsistencia.