31 août 2022
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Dora De Lima, « La Vie de Marillac : un essai hagiographique ? Analyse comparée des sources utilisées par Nicolas Lefèvre de Lezeau dans la Vie de Marillac et la Vie de Morvillier », Les Dossiers du Grihl, ID : 10.4000/dossiersgrihl.5009
Considérer Nicolas Lefèvre de Lezeau comme le biographe de son grand oncle ou comme l’hagiographe de son ami Michel de Marillac revient à glorifier la mémoire des trois héros au détriment du projet d’écriture de l’auteur. La Vie de Jean de Morvillier et la Vie de Michel de Marillac sont vivement marquées par l’omniprésence de leur auteur, quand bien même l’illusion de la richesse documentaire sur les trois héros voudrait l’estomper. Parce qu’ils convoquent une documentation riche et de nombreuses références littéraires, les trois récits de vie retrouvés témoignent d’une quête d’authenticité par leur auteur. En ce sens, la Vie de Marillac se dégage des deux autres récits de vie écrits par Lezeau. Le conseiller d’état n’y cherche effectivement pas seulement à raviver la mémoire de la Ligue dans le milieu dévot, ni même à construire une filiation entre ces deux partis. L’originalité de la Vie de Marillac tient de l’abondance des références spirituelles et de l’autorité que les mystiques incarnent pour sa validation. Pour les mystiques, la vie chargée d’un officier d’état demeure incompatible avec le mode de vie humble et contemplatif d’un « petit ». Du côté des politiques, la « cabale des dévots » représente une menace croissante pour l’autorité du roi. Dès lors, la Vie de Marillac de Lezeau nous invite à réfléchir sur les caractéristiques de rejet d’un modèle de sainteté (E. Suire). La postérité retient Marillac pour sa témérité et sa faillite face à la raison d’état de Richelieu, comme l’attestent le peu de biographies des xixe-xxe siècles de ce garde des sceaux. Parallèlement, si Marillac est décrit comme un laïc ayant fait preuve d’une grande dévotion dans les Histoires de l’ordre des Carmélites déchaussées parues aux xixe et xxe siècles, sa part active à la fondation de l’ordre en France ne suffit pas à faire de lui un saint. Mais la (ré)conciliation entre les deux aspects de la vie de Michel de Marillac n’a pas été retenue, alors que c’est bien ce modèle que Nicolas Lefebvre de Lezeau semble avoir voulu laisser à la postérité.