6 décembre 2021
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Olivier Thévenaz, « Sublime et ridicule? Autour de quelques élévations célestes d’Horace », Études de lettres, ID : 10.4000/edl.3699
Monter au ciel: l’idée a fasciné l’homme sans doute de tout temps. Avant que le XXe siècle ne la rende possible, c’est un rêve de démesure, un interdit, notamment dans l’Antiquité romaine, très superstitieuse; mais malgré Icare, qui chute pour avoir voulu monter trop haut, la tentation reste. Cet article étudie les élévations au ciel du premier recueil lyrique d’Horace, trois livres d’Odes publiés en 23, en un temps où les guerres civiles sont encore fraîches dans les mémoires, mais où il n’y a plus d’obstacle à la prétention d’Auguste à la divinité. Le poète a le pouvoir d’immortaliser. Horace en est conscient: dans quelques poèmes, à des points stratégiques de son recueil, il élève Auguste et s’élève lui-même – deux faces d’une même médaille. Mais ce n’est pas sans scrupules: nous tenterons de voir comment et pourquoi il y met des limites. La lecture proposée ici sera non seulement politique, mais aussi poétique et stylistique. L’élévation implique à la fois une aspiration au sublime et le risque de la chute dans le ridicule. J’aimerais montrer qu’Horace assume ce risque en le concrétisant avec ironie pour le conjurer, abaisse par la caricature une prétention sérieuse pour la rendre acceptable. Un accent plus particulier portera, pour l’élévation d’autrui, sur l’apothéose de Romulus (décisive pour Auguste) dans l’Ode III, 3, où je suggère la présence en filigrane d’un modèle satirique, et pour l’élévation du poète, sur l’épilogue du livre II et sa métamorphose en cygne sublime et ridicule.