27 juin 2023
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Jean-Claude Mühlethaler, « Le «rooil de oubliance». Écriture de l’oubli et écriture de la mémoire dans Le Livre de l’Espérance d’Alain Chartier », Études de lettres, ID : 10.4000/edl.5636
Le Livre de l’Espérance s’ouvre sur une scène dont François Villon s’est très probablement souvenu. Mélancolie fait irruption dans la chambre de l’Acteur et le précipite dans un état de léthargie, lequel ouvre les portes à la fantaisie dont l’action incontrôlée conduit au désarroi et au désespoir. Il faut qu’Entendement retrouve la clé du guichet de la mémoire, bloqué par la rouille de l’oubli, pour que s’interrompe ce mouvement néfaste. Son intervention scinde le texte en deux parties: en amont, il y a les monstres nés des ténèbres de la raison engourdie, en aval, l’enseignement des Vertus théologales qui conduit l’Acteur à une dignité retrouvée. La structure en diptyque est celle d’une consolatio s’inspirant du modèle de Boèce. Paradoxalement – et c’est bien ce paradoxe qu’il convient d’interroger – le discours des monstres aussi bien que celui des Vertus se construit sur le souvenir des auctoritates, sur la citation tirée des livres anciens. Le bien comme le mal recourent à la mémoire collective, se servent des mêmes armes rhétoriques pour tirer l’homme de leur côté. Quelle est donc la nature et la fonction de l’oubli dans Le Livre de l’Espérance? La question conduit au cœur des enjeux idéologiques de la dernière œuvre (inachevée) d’Alain Chartier; elle révèle aussi une réflexion sur l’acte même d’écrire dont Villon prendra le contre-pied.