27 avril 2020
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Christian Topalov, « Réforme, science et politique : points de vue croisés sur les conditions morales de la domination », Égypte/Monde arabe, ID : 10.4000/ema.6524
Deux dimensions en tension sont constitutives de ce qu’Alain Roussillon a défini comme le « réformisme » dans le premier XXe siècle égyptien et, plus largement, les situations de domination coloniale ou semi-coloniale : il y a urgence à changer notre société pour qu’elle surmonte son arriération, mais cela ne peut être fait en imitant l’Occident. La catégorie de « réforme » (al-islâh) était alors « le lieu commun de toute pratique intellectuelle et politique », au sens où elle était partagée par les milieux « réformistes » au sens étroit et par leurs adversaires politiques : c’est cette « clôture réformiste » qui permet de comprendre, par exemple, les trajectoires opposées, mais parallèles, de Sayyid Qutb et Sayyid ‘Uways, le théoricien des Frères musulmans et le « travailleur social organique » des années 1920 et 1930.Les concepts élaborés par Roussillon pour penser l’Égypte colonisée viennent interroger et modifier les questionnements sur la « réforme » de l’autre côté de la grande division du monde. La déploration de la présence des barbares au coeur de la grande ville et de la décadence des classes dirigeantes n’était pas l’exclusivité des élites colonisées : elle était souvent au principe du sursaut réformateur parmi les intellectuels des couches montantes dans les métropoles industrielles. Mais, contrairement aux élites réformatrices des colonies, ils ne doutaient pas de leur capacité morale à être porteurs d’un renouveau national.