Faire le procès du capitalisme néolibéral : usages de l’affaire France Télécom dans la littérature contemporaine

Résumé Fr En

L’affaire France Télécom est un révélateur de la transformation de la société française sous le coup des politiques néolibérales. Si l’événement a déjà bénéficié d’une importante couverture médiatique, des œuvres littéraires s’en sont emparées. L’analyse de deux d’entre elles, Cora dans la spirale de Vincent Message (2019) et Personne ne sort les fusils de Sandra Lucbert (2020), est l’occasion de faire valoir un traitement proprement littéraire du procès à des fins de critique du capitalisme contemporain, notamment à partir d’une réflexion sur les motifs de l’instruction et de la comparution, qui font l’objet de traitements littéraires distincts dans ces deux œuvres. Quand la première œuvre fait valoir la richesse d’une poétique romanesque pluraliste pour appréhender les injustices de notre monde contemporain à travers le grain de singularités multiples, la seconde travaille des techniques de montage afin de décaper le mince vernis rhétorique de la langue néolibérale, sous lequel apparaît la lutte des classes. Aux poétiques distinctes mises en œuvre correspondent des conceptions différentes de ce que peut être une critique sociale par la littérature.

The France Télécom trial illustrates a shift of French society influenced by neoliberal policies. Though the event gathered considerable media coverage, some authors also used it as a foundation for literary works. The analysis of two of these works, namely Cora dans la spirale by Vincent Message (2019), and Personne ne sort les fusils by Sandra Lucbert (2020), constitutes an opportunity to put forward their properly literary treatment of the trial as a critique of contemporary capitalism, most notably through the motifs of investigations and court hearings – which are subject to different literary interpretations in each of these works. While the first one puts forward rich and pluralistic poetics in an effort to capture the injustice of contemporary life through the prism of diverse singularities, the second one operates montage techniques to scrape through the thin rhetorical varnish of the language of capitalism and show the class struggles peering through. To each distinct literary device at play corresponds a different view on what literary social critique can be.