28 juin 2013
Ce document est lié à :
info:eu-repo/semantics/reference/issn/0984-2632
Ce document est lié à :
info:eu-repo/semantics/reference/issn/2107-0784
All rights reserved , info:eu-repo/semantics/openAccess
Pierre Vaydat, « Réflexions sur le lyrisme de Erich Kästner durant la phase finale de la «Neue Sachlichkeit» », Germanica, ID : 10.4000/germanica.2092
Le lyrisme de Kästner est populaire aujourd’hui encore, malgré son message provocant de désillusion, qui lui a valu de nombreuses réactions de rejet. Dans cet article, on n’étudie pas l’attitude politique du poète, mais son mode personnel d’expression de soi, ce qui chez lui est littérature, lyrisme à proprement parler, par opposition à la froideur « néo-objectiviste » qu’il arbore et à sa gouaille typiquement berlinoise. Kästner rompt de manière ostentatoire avec le romantisme prolongé, avec la conception traditionnelle du moi lyrique ; il renonce à la confession, à l’anthropomorphisation de la nature, au rapport à la transcendance, au style sublime, pour devenir l’expression polyphonique de l’âme citadine. Le sentiment d’aliénation, la conscience d’être un médiocre, un n’importe qui, un être interchangeable, la banalité des phantasmes d’évasion qui caractérisent l’individu salarié dans l’univers du rendement, son langage jargonnant trahissant par ses clichés mêmes un accablant mutisme, voilà la matière des quatre volumes de poèmes publiés par Kästner durant les années de la République de Weimar. Le talent du poète est d’avoir triomphé de ce prosaïsme omniprésent et sans issue par le pouvoir d’émotion d’une tonalité combinant l’esprit de dérision parfois nihiliste et une tendresse imprégnée d’humanisme.