24 juillet 2017
Ce document est lié à :
info:eu-repo/semantics/reference/issn/0984-2632
Ce document est lié à :
info:eu-repo/semantics/reference/issn/2107-0784
All rights reserved , info:eu-repo/semantics/openAccess
Maurice Godé, « Figures du féminin dans les récits de Thomas Mann jusqu’en 1912 », Germanica, ID : 10.4000/germanica.3752
Les premiers récits de Thomas Mann mettent en scène des femmes infidèles, sans cœur et sans cervelle, qui usent de leur pouvoir de séduction pour asservir les hommes. « [La sexualité] est le poison à l’affût dans toute beauté », confie le jeune Thomas Mann à l’ami Grautoff. À partir du Petit Monsieur Friedemann (Der kleine Herr Friedemann, 1886), il met en œuvre des « masques discrets » (caricature, autodérision notamment) qui lui permettent de prendre une certaine distance par rapport à ses phobies. Par le personnage du bajazzo, il prend conscience des rapports étroits existant entre le manque de confiance en soi, le désir qui porte vers la beauté et la haine inspirée par les gens heureux. D’autres récits montrent que la femme peut, elle aussi, être victime de rapports de pouvoir : le baron Harry dans Un bonheur (Ein Glück) n’est pas moins brutal qu’Amra Jacoby dans Petite Louise (Luischen). Enfin, la dimension homoérotique présente dans certains récits – en premier lieu La Mort à Venise (Der Tod in Venedig) – contribue à relativiser les différences entre les sexes. La passion amoureuse est l’irruption de forces incontrôlables, un cataclysme (« Heimsuchung ») contre lequel Gustav von Aschenbach et le petit Monsieur Friedemann sont aussi démunis que – dans Joseph en Egypte (1936) – Mut-em-enet, l’épouse de Potiphar, tombée éperdument amoureuse de Joseph. Le « bonheur discipliné » attendu du mariage n’est jamais assuré.