4 juillet 2012
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Eckhard Gillen, « „Die Einheit von Kunst und Leben“ – eine totalitäre Utopie der politischen und künstlerischen Avantgarde. Die Kulturrevolution in der SU 1929 und der Bitterfelder Weg in der DDR 1959 im Vergleich », ILCEA, ID : 10.4000/ilcea.1287
En publiant son programme de la « voie de Bitterfeld », dont le nom se rapporte au premier congrès de Bitterfeld en avril 1959 dans la Maison de la Culture de l’entreprise du peuple (= nationalisée) qui porte le nom de combinat électrotechnique de Bitterfeld, le parti socialiste unifié est-allemand (= parti communiste) exige des artistes « d’unir l’art avec la vie », de combler « le profond fossé qui sépare l’art du peuple » en créant un art « populaire » et en promouvant un art « amateur » (« la création artistique populaire ») dirigé par des artistes professionnels. « Ainsi […] sera une fois pour toute abolie dans notre RDA la séparation de l’art et de la vie. » Les artistes devaient donc animer des cercles où ils donneraient aux ouvriers une formation artistique en vue de les transformer, conformément à l’« humanisme socialiste », en « hommes nouveaux » capables d’épanouir toutes leurs potentialités. Ainsi serait dépassée l’exploitation capitaliste des ouvriers contraints à un travail à la chaîne unilatéral. L’appel à abolir la frontière entre art et vie fait penser aux manifestes des expressionnistes et « actionnistes » allemands après la première guerre mondiale et à l’avant-garde soviétique de la révolution culturelle des années 1920. Selon la « voie de Bitterfeld », les « collectifs » d’ouvriers devaient discipliner les individualistes bourgeois qu’étaient les artistes que l’influence des cadres du Parti devait enfin soumettre. Le principe de l’éducation de l’artiste par le peuple aboutit au contraire : les artistes se solidarisent avec la résistance des ouvriers aux mauvaises conditions de travail. Lors du fameux Plénum du Parti dit de la « table rase » de décembre 1965, l’écrivain Christa Wolf comprend « que les relations entre les artistes et les entreprises les conduisaient à voir la réalité de ce qui s’y passait et à nouer des amitiés avec les ouvriers, les directeurs et d’autres professions et à être en fin de compte très bien informés de la réalité économique du pays ». C’est pour cette raison que le Parti mit en 1965 un terme à cette possibilité d’agir ouverte à l’art que les artistes et les écrivains avaient si bien su exploiter. La conséquence de l’expérience fut la naissance en RDA d’un art « vraiment » réaliste, qui dépassa le « réalisme socialiste » idéalisateur et mensonger. Le parallèle avec le rôle d’Ai Weiwei en Chine et le traitement qui lui a été réservé s’impose.