(Faire) juger l’image de la précarité dans les films muets (1897-1926)

Résumé Fr En

Certaines fictions qui mettent en scène la précarité traitent des limites morales au cœur de la division sociale en donnant à évaluer à la fois la figure du démuni et nos propres facultés de le juger. Cependant la précarité à l’écran consolide aussi un modèle cinématographique de causalité et de linéarité, ainsi que les bases d’un montage reposant sur la continuité et la discontinuité, qui opère dès le début du xxe siècle. Dès lors, le personnage du pauvre, dans des fictions considérées comme des tribunaux imaginaires, contribue au développement de la narration qui implique des enjeux figuraux. D’un côté, l’ambivalence sociale des figures de la précarité est un moteur narratif et une source de tensions dont profite le récit. D’un autre côté, le travail de l’image ouvre aussi le champ de la diégèse aux motifs du rêve ou du fantasme à travers la précarité figurale qui possède elle-même un sens social.

Some fictions that portray precariousness deal with the moral limits at the heart of the social division in order to evaluate both the character of the poor and our own faculties of judging him. However precariousness on the screen also consolidates a cinematographic model of causality and linearity, as well as the foundations of a montage based on continuity and discontinuity, which is set up at the beginning of the twentieth century. Thus, the figure of the poor, in fictions considered as imaginary courts, contributes to the development of narration which involves figural stakes. On the one hand, the social ambivalence of the figures of precariousness is a narrative engine and a source of tension that benefits the narrative. On the other hand, the image also opens the field of story to the motives of dream or fantasy through the figural precariousness which possesses itself a social sense.