31 janvier 2012
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Barbara H. Rosenwein, « Les communautés émotionnelles et le corps », Médiévales, ID : 10.4000/medievales.6278
Il y a longtemps Alain de Lille affirmait que les gestes et les expressions faciales des émotions étaient des fenêtres ouvertes sur la « disposition intérieure » d’une personne, tandis que de nos jours Paul Ekman soutient que certaines expressions faciales constituent des « émotions basiques ». Cependant, comme cet article le montre, en réalité le lien entre le corps et les émotions est (et demeure) extrêmement divers. L’article aborde les émotions dans le contexte des « communautés émotionnelles » – des groupes sociaux à l’intérieur desquels les individus sont animés par des intérêts, des valeurs et des styles émotionnels communs ou semblables. Les communautés émotionnelles intègrent (ou n’intègrent pas) le corps dans l’expression de l’émotion de différentes manières. Ce constat est illustré par trois exemples médiévaux. À la cour mérovingienne de Neustrie au viie siècle, les émotions étaient rarement incarnées. Au contraire, pour Thomas d’Aquin et ses disciples au xiiie siècle, les émotions étaient explicitement associées au corps et aux changements somatiques. Mais cependant, pour ce groupe de dominicains, les émotions pouvaient, si elles étaient orientées de façon appropriée, transcender le corps. Enfin, Margery Kempe et ses semblables usaient de leur corps en manifestant leurs émotions de façon dramatique, par des hurlements, des larmes ou des contorsions de douleur. L’article se clôt en suggérant que ces variations dans les modalités d’incorporation permettent de questionner la conception d’émotions « universelles ».