25 septembre 2013
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Julien Loiseau, « Les événements de l’année 806. Ou comment al-Maqrīzī a pensé une rupture majeure dans l’histoire de l’Égypte », Médiévales, ID : 10.4000/medievales.6983
La crise qui frappa l’Égypte à la fin du Moyen Âge, et qui connut son paroxysme dans les premières années du xve siècle, a laissé une empreinte durable dans l’histoire du pays et de sa capitale. Avant d’attirer l’attention des historiens, elle a marqué l’esprit des contemporains et modifié en profondeur le regard qu’ils portaient sur leur histoire. De tous ceux qui tentèrent alors de comprendre la brutalité du temps présent à la lumière du passé de l’Égypte, Taqīy al-Dīn Aḥmad al-Maqrīzī (1364-1442) se distingue par l’importance de son œuvre historique et son souci d’apporter un diagnostic et un remède à la maladie de son époque.La réflexion d’al-Maqrīzī, littéralement obsédé par les « événements » intervenus au cours de l’année 806 de l’Hégire (1403-1404) dont le pays ruiné portait la trace funeste, a cependant évolué au fil du temps. L’analyse à chaud, qu’il expose dès 1405 dans l’Iġāṯat al-umma, propose de voir dans les malheurs du temps, en les comparant aux épreuves du passé, les effets d’une cherté qui se maintient anormalement au lieu de se résorber deux saisons après les désastres naturels qui l’ont provoquée. Dans la suite de son œuvre, et tout particulièrement dans ses fameuses Ḫiṭaṭ, le concept de cherté (ġalā’) est abandonné au profit de celui de ruine (ḫarāb). L’Égypte n’est pas seulement malade du mauvais gouvernement des Mamelouks. L’arbitraire de l’État, et sa fiscalité prédatrice, ont précipité le pays sur une pente dont il ne se relèvera pas. Le profond pessimisme d’al-Maqrīzī, démenti par le redressement de l’État mamelouk, n’enlève rien cependant à la force de son constat et à la finesse de ses analyses.