Auto-interprétation, délibération et expression

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14 février 2014

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Sophie Djigo, « Auto-interprétation, délibération et expression », Methodos, ID : 10.4000/methodos.3004


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Partant de l'idée énoncée par le philosophe Charles Taylor, selon laquelle les êtres humains sont « des animaux capables d'auto-interprétation », cet article vise à comprendre le rôle constitutif de l'auto-interprétation dans la connaissance de soi. Une conception satisfaisante de l'auto-interprétation devrait à la fois rendre compte de l'autorité de la connaissance de soi en première personne et satisfaire les exigences du réalisme ordinaire. Si la version constitutiviste de l'auto-interprétation semble incompatible avec de telles exigences, c'est parce qu'elle considère ce pouvoir constituant comme le privilège du sujet de modeler ses états mentaux au gré de sa volonté. Pour autant, il est possible de conserver un rôle constitutif à l'auto-interprétation en évitant toute implication volontariste et en maintenant une certaine indépendance des contenus mentaux du sujet envers lui-même. C'est ce que proposent les philosophes américains Richard Moran et David Finkelstein, le premier, en redéfinissant l'activité d'auto-interprétation en termes de croyance impliquant l'adhésion du sujet à ses attitudes mentales. Considérant le sujet en tant qu'agent responsable de ses attitudes, Moran défend une conception cognitive et engagée de l'interprétation, un point de vue pratique du sujet sur lui-même. La délibération fournit ainsi les raisons d'adopter une croyance, un désir, une émotion,... raisons qui justifient en même temps l'auto-interprétation. Moins attaché à la valeur cognitive de l'auto-interprétation, Finkelstein développe également une conception pratique de la connaissance de soi, fondée sur la fonction expressive des auto-attributions et où l'auto-interprétation a valeur de contexte de cela même qu'elle interprète.

In recent years, the philosopher Charles Taylor offered to define human beings as « self-interpreting animals », meaning that self-interpretation is constitutive of self-knowledge. However, it is difficult how we should understand this constitutive role and it is true that a correct conception of self-interpretation should both give an account of first-person authority in self-knowledge and satisfy the minimal requirements of ordinary realism, in order for self-knowledge to be substantial. It appears that Taylor's constitutivism cannot satisfy such requirements since it says that a person's self-interpretation constitutes its object in the sense that the person's own interpretation of his state suffices for its being that very way. However, rejecting the voluntarist implications of the idea of constitution does not mean rejecting self-interpretation as constitutive, and it is possible to keep the idea of such a constitutive relation between the subject and his own mental life while accepting a certain independence of one's mental contents. This line of thought is to be found for instance in Richard Moran and David Finkelstein. According to Moran, we need a new definition of the very notion of interpretation, which does not refer to an ordinary and indifferent activity, but to a cognitive one. Hence his suggestion to think of interpretation as a belief implying the agent's endorsement of his own mental attitudes. Focusing on agency, Moran offers to adopt a practical conception of self-knowledge according to which the person's deliberation provides him with reasons to believe, desire, feel,..., such reasons also justifying his self-interpretation. Finkelstein's point is not the cognitive dimension of interpretation, rather its expressive function. He develops a practical conception of self-knowledge based on the subject's expressions, where self-interpretation also plays a contextual role.

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