22 juin 2020
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Leonid Livak, « Les deux solitudes de l’intelligentsia exilée », Cahiers du monde russe, ID : 10.4000/monderusse.11402
La désintégration de la diaspora antisoviétique en tant que communauté culturelle, dont l’épicentre se trouvait en France dans l’entre‑deux‑guerres, n’a fait l’objet d’aucune étude systématique. À force d’esquiver ce sujet, nous perdons de vue la nature complexe de la Russie en exil, comme en atteste sa fréquente réduction à un milieu ethniquement russe et culturellement chrétien orthodoxe. Le présent article suggère que la perte de la diversité ethno‑confessionnelle dans la communauté russophone en France – le noyau intellectuel de la Russie en exil – fut parmi les raisons de son déclin précipité dans les années 1940. Cette érosion de la diversité de la diaspora russophone concerne avant tout sa composante juive, qui était très active dans la vie culturelle russe en France du fait même de la forte présence de juifs dans l’intelligentsia émigrée. L’article s’attache à montrer que les expériences de la Seconde Guerre mondiale, divergentes pour la vaste majorité des émigrés non‑juifs de celles de leurs compatriotes juifs, produisirent des fractures fatales à la cohésion communautaire de la Russie en exil. Cette impossibilité d’harmoniser ces expériences dans un récit rétrospectif unique expliquerait en partie la réticence des mémorialistes émigrés et des premiers historiens de l’émigration antisoviétique à traiter des années 1940.