5 février 2015
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Sonja Luehrmann, « The spirit of late socialism and the value of transformation », Cahiers du monde russe, ID : 10.4000/monderusse.7967
Cet article conteste la thèse d’un renouveau religieux durant l’époque brejnévienne et cherche d’autres explications à la façon dont cette période a façonné les consciences et les habitudes des activistes religieux postsoviétiques. En s’appuyant sur des recherches archivistiques portant sur le travail culturel de l’époque brejnévienne dans la région de la Moyenne Volga, ainsi que sur des entretiens avec des activistes religieux postsoviétiques, l’auteur avance que le renouveau religieux a davantage été un phénomène postérieur à la perestroïka. Cependant, il a été possible grâce à une contradiction centrale des années Brežnev : l’hommage rhétorique durable à la nouveauté et au changement social et personnel, sous un régime qui entravait drastiquement toute véritable initiative de changement. Professeurs, propagandistes, journalistes et autres représentants de professions de la sphère culturelle devaient constamment justifier leur utilisation de « nouvelles méthodes » et de « nouvelles approches ». Ils apprirent à décrire les effets de leur travail en termes de « spiritualité » et de « développement spirituel », ce qui, en pratique, signifiait à peine plus qu’être pourvu d’une éducation classique et faire preuve d’une bonne éthique de travail. Comme la pratique religieuse était devenue plus accessible durant la perestroïka et au début des années 1990, certains de ces professionnels y virent une voie vers une transformation plus radicale. La combinaison des preuves biographiques et documentaires repoussa les limites temporelles de l’ère brejnévienne : l’hommage krouchtchevien au changement survécut à la « stagnation » brejnévienne. Celle‑ci, à son tour, favorisa l’éclosion d’un lexique de la spiritualité, plus communément associé à la perestroïka et à ses lendemains.