La genèse des créoles des Mascareignes et des Seychelles : microcosme et substrats

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26 novembre 2015

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Robert Chaudenson, « La genèse des créoles des Mascareignes et des Seychelles : microcosme et substrats », Études océan Indien, ID : 10.4000/oceanindien.1503


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L’idée de regarder les archipels créoles de l’océan Indien (Mascareignes et Seychelles) comme le microcosme d’un macrocosme qui serait l’océan Indien occidental lui-même était chère à Paul Ottino. Elle est intéressante, à condition toutefois qu’elle soit mise en œuvre avec prudence, nuance et rigueur, mais plus encore avec une connaissance réelle des réalités historiques, linguistiques et sociétales de la zone. Ce n’est assurément pas le cas des positions prises par un certain nombre de chercheurs allemands (S. Kriegel, R. Ludwig et S. Michaelis) dont les motivations ne sont pas nécessairement très claires et qui emboîtent le pas à A. Bollée qui, de façon inattendue, s’est rangée sur les brisées de P. Baker qui est, somme toute, l’initiateur de la plupart de ces chimères. Tous ces auteurs refusent, d’un bloc, ma théorie dite du « bourbonnais » qui repose essentiellement sur des identités évidentes entre les créoles réunionnais et mauricien que ces auteurs sont bien obligés de reconnaître sans être capables d’en donner la moindre explication! Pourtant, elles s’expliquent fort bien si l’on prend en compte que pendant une année entière (1721-1723), lors du début de l’occupation de l’Île de France (aujourd’hui Maurice) les « coopérants » venus de Bourbon (aujourd’hui la Réunion), Blancs et Noirs, loués par la Compagnie des Indes « pour instruire » les nouveaux arrivants, ont formé 25 % de la population active de l’île dans le secteur vital de la production agricole. De ce fait, modèles sociaux et professionnels, ils ont inévitablement transmis dans leur langue (que je nomme le « bourbonnais » pour éviter d’en faire prématurément un « créole ») tout leur savoir et les dénominations dont ils usaient pour nombre d’éléments de l’environnement. Cela est vrai, tout aussi bien pour des centaines de lexèmes que surtout pour des éléments grammaticaux tout à fait spécifiques et inconnus de tous les autres créoles de la zone américano-caraïbe comme « bane » pour la pluralité ou « zot » comme marque possessive et personnelle de 2e et 3e personnes de pluriel 2 et 3. Plus important encore est le fait que 80 % des termes créoles d’origine malgache soient communs aux deux créoles réunionnais et mauricien, ce que l’on ne peut évidemment pas mettre au compte du simple hasard. Toutefois, ces chimères reposent essentiellement aussi bien sur des ignorances historiques et linguistiques que sur des usages abusifs du mot « substrat » qui n’a nullement, dans les sciences du langage, le sens que leur prêtent ces auteurs en découvrant un substrat bojpouri en créole mauricien et un substrat bantou en seychellois pour des faits attestés dans ces créoles avant même l’arrivée des populations en cause.

The idea of considering the Creole islands of the Indian Ocean (Mascarenes and Seychelles) as a microcosm of a macrocosm that is the South-Western Indian Ocean itself was dear to Paul Ottino. It is interesting, provided it is empirically implemented with caution, nuance and rigor, but, most important of all, with a thorough knowledge of the historical, linguistic and social background of this area. It is certainly not the case with the positions sustained by a number of German researchers (S. Kriegel, R. Ludwig and S. Michaelis) whose motivations are not necessarily very clear and follow the lead of A. Bollée, which, unexpectedly, puts her steps in those of P. Baker who is, after all, the initiator of most of these chimeras. All these authors reject my theory known as the “Bourbon Creole theory” which is essentially based on obvious analogies between Reunion and Mauritius Creoles, but cannot provide for any other alternative theory able to explain these overwhelming analogies! These analogies become however easily accountable if one takes into account that for a whole year (1721-1723), at the beginning of the settlement in the Ile de France (now Mauritius), people were brought from Bourbon (now Réunion), both Blacks and Whites, leased by the Compagnie des Indes (French West Indies Company) “to teach” the newcomers in Ile de France, and have formed up to 25% of the active population of the island in the vital sector of agricultural production. They were considered as social and professional models, and thus they inevitably transmitted in their language (which I call the “Bourbonnais” to avoid creating a premature “Creole”) all the local names for various natural realia. This is true not only for hundreds of lexemes but also for grammatical items, quite specific and not attested in all other Caribbean and American Creoles, such as “bane” for the expression of plurality or "zot" as possessive and 2nd and 3rd plural personal markers. More importantly the fact that 80% of Creole terms of Malagasy origin are common to both Reunion and Mauritius creoles, cannot be accounted for by mere chance.However, the chimeras referred to above are mainly based on both historical and linguistic ignorance and on the misuse of the word “substrate” which does not have, in language science, the meaning attributed to them by these authors who claim to have discovered a Bhojpuri substrate in Mauritian creole and a Bantu substrate in Seychelles creole, before the arrival of the people who, historically, could have brought them along!

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