1 octobre 2014
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Jacinthe Mazzocchetti, « Le corps comme permis de circuler », Parcours anthropologiques, ID : 10.4000/pa.271
A partir de matériaux ethnographiques récoltés auprès de demandeurs d’asile, de réfugiés et de « rejetés » (rejected) africains, dans un double terrain situé en Belgique et à Malte, cet article se propose de réfléchir la question du corps comme permis de circuler en contexte de « durcissement des politiques d’immigration et d’intégration » (Favell, 2010 : 44). Au travers des récits récoltés auprès de migrants n’ayant pu bénéficier d’un visa leur permettant d’entrer en Europe de façon légalisée, il apparait que, dans leur trajectoire migratoire, le corps est avant tout un corps résistant, un corps-héros, vainqueur dans la traversée des espaces géographiques que sont les routes insécurisées, les mers et les déserts. Corps-héros qui une fois la personne enfermée à l’arrivée en Europe perd de sa force au travers des vécus de déshumanisation progressif et d’exclusion des espaces géographiques et symboliques. La détention, espace d’enfermement qui vient matérialiser le non-droit à être mobile, à se déplacer là où l’on souhaiterait vivre, peut être analysé comme un espace transitoire de déshumanisation. En parallèle, le corps-souffrant, résultat parfois du broiement des temps d’enfermement, est porteur de possibilités de régularisation… Il peut devenir un espace transitoire de ré-humanisation, ceci dit une ré-humanisation partielle qui ne reçoit l’autre qu’au travers d’une identification à sa souffrance, par compassion. Ce corps broyé, ce corps-souffrant, expression matérielle des désillusions, des colères et des désespérances, permet à certains d’être reconnus semblables, sans être reconnus égaux pour autant…