10 mars 2021
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Myriam Bennour-Azooz et al., « L’arbre à Tunis : hypothèses pour une histoire de l’espace public », Projets de paysage, ID : 10.4000/paysage.15536
L’arbre fait partie du paysage urbain. Il est intégralement « enraciné » dans le cadre de vie des citadins. L’histoire de l’évolution des paysages urbains de Tunis peut être lue à travers ses arbres et leur agencement. C’est l’hypothèse principale de cette thèse. Avant la colonisation, la médina disposait de peu d’arbres dans l’espace public, car l’organisation spatiale puisait ses fondements dans la sharia (loi divine), et le premier précepte d’entre eux était le respect de l’intimité des familles. C’est pour cette raison principale que les rues restaient étroites et peu entretenues. Mais les arbres trouvaient parfois leur place à l’intérieur des demeures, dans les patios, lieux de la vie intime et familiale. Les essences que l’on retrouvait le plus souvent étaient celles qui étaient citées dans le Coran pour leurs vertus, essentiellement des agrumes et des espèces aromatiques (on obéissait aux préceptes de la loi divine jusque dans l’organisation des intérieurs). Puis, à la fin du xixe siècle, lors de l’instauration du protectorat français, la ville s’est étendue au-delà des remparts. Les grandes avenues bordées d’alignements d’arbres, de nouvelles espèces parfois taillées, ont fait leur apparition. La ville européenne s’est ouverte aux arbres et les Tunisois ont commencé à découvrir un autre monde urbain importé d’Europe. Avec l’indépendance (en 1956), la capitale gonflée par l’exode rural s’est étalée. D’un côté, les Tunisois aisés voulant accéder au mode de vie moderne ont habité de nouveaux quartiers alliant style européen (rues larges, arbres d’alignements imposants) et traditions tunisoises (grands jardins plantés d’agrumes et d’espèces aromatiques). De l’autre, des Tunisiens de la campagne fuyant une vie difficile et en quête de meilleurs revenus se sont approprié des espaces jouxtant la capitale et y ont reproduit – dans la mesure du possible – leur mode de vie rurale.