31 janvier 2012
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Nadine Lefaucheur et al., « Itinéraires féminins de sortie de la violence conjugale », Pouvoirs dans la Caraïbe, ID : 10.4000/plc.868
Le renoncement des femmes à leur idéal familial, conjugal ou amoureux, ou à la « respectabilité » sociale que leur confère malgré tout leur relation conjugale, apparaît comme un préalable indispensable à leur engagement dans un itinéraire de sortie de la violence conjugale. Mais, à l’origine de celui-ci, il y a généralement un déclic qui, dans une prise de conscience, souvent lente et progressive, de l’anormalité de la situation vécue, fonctionne comme une révélation brutale qu’elles ne pourront plus la supporter, car « trop, c’est trop ! ». Les migrantes rencontrées par l’intermédiaire d’une association féministe ou d’un centre d’hébergement ont, pour la plupart, pu sortir de la situation de violence grâce à ces institutions et aux assistantes sociales qui les avaient orientées vers elles ; mais, elles ont souvent, surtout si elles étaient originaires des états voisins de la Caraïbe, vécu auparavant une longue « galère » : sans ressources, sans réseau social, elles ne savaient ni à qui s’adresser ni ou fuir, pour elles et leurs enfants, la violence de leur conjoint. Par méconnaissance ou par crainte que, dans une société d’interconnaissance, leurs démarches ne puissent rester confidentielles, les « Martiniquaises » rencontrées à la suite de l’enquête téléphonique s’étaient au contraire rarement adressées aux associations ou aux institutions policières ou sociales censées leur venir en aide. C’est parfois la résignation à une séparation ou à un divorce, d’abord refusés pour des raisons matérielles et/ou idéologiques, qui leur a permis de « renaître ». Parfois, au contraire, en dépit de la perte du confort matériel et de la respectabilité conjugale, elles ont pris l’initiative de la rupture pour fuir le risque d’un « crime passionnel » ou malgré la crainte d’un tel risque, paradoxalement accrue par la dénonciation médiatique des fémicides conjugaux. Mais, il est frappant de constater que, plus que sur l’aide de leurs proches ou des institutions, la plupart de ces femmes ne pensaient pouvoir compter, pour sortir de la violence conjugale, que sur leurs propres forces et sur l’aide de Dieu.