23 août 2016
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Pascal Bataillard, « James Joyce et les couleurs du sinthome », Polysèmes, ID : 10.4000/polysemes.522
Je souhaite montrer que Joyce, auteur réputé indifférent au monde visuel et tout entier du côté de l’audible, a un usage très insistant de la couleur jouant un rôle clé dans la fabrication de ce que Lacan a nommé sinthome – concept créé pour Joyce, pour désigner la manière dont l’artiste se forgea un nom dans l’écriture par défaut de Nom-du-Père. Le rôle de la couleur évolue, passant par une fonction symbolique et démonstrative de la paralysie irlandaise dans certaines nouvelles de Dubliners, avant de basculer sur un versant symptomatique qui ouvre une dimension silencieuse et intrigante. Dans A Portrait of the Artist as a Young Man, l’usage du maroon caractérise le sinthome : aussi bien en tant que couleur, changeante, instable et mêlant le pur et l’impur, qu’en tant que vocable marqué par des transferts culturels, où ce principe d’hybridation et d’impureté est actif jusque dans la lettre. Ce maroon dessine aussi bien le portrait de l’artiste en jeune homme échoué dans une société en panne, que de son art puisant des ressources explosives dans des couleurs et pigments suggérant une peinture complexe des forces politiques et culturelles, prélevés in fine au plus près des forces pulsionnelles.