17 novembre 2014
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Raymond Michel, « « Il n’y a jamais que des contextes » », Pratiques, ID : 10.4000/pratiques.1777
La critique littéraire adhère, en général, à un réquisit communément admis : tout texte possède des caractéristiques objectives, inhérentes et essentielles, qui déterminent l’interprétation que l’on peut en faire. Stanley Fish (Quand dire c’est faire. L’autorité des communautés interprétatives) rompt avec une telle conception qui présuppose la possibilité d’une adéquation entre nos discours et un réel préexistant autonome. Il opère un double renversement. D’une part, déniant toute autorité au texte et refusant l’existence d’un sens toujours déjà-là, il montre que les lecteurs n’interprètent pas les textes, mais qu’ils les fabriquent, les textes n’étant que ce qu’ils en font lorsqu’ils les lisent ; d’autre part, refusant toute dérive libertaire et idiosyncrasique qui hypostasierait le pouvoir d’un lecteur solipsiste, il reverse ce pouvoir de créer des textes aux communautés interprétatives auxquelles il est impossible d’échapper. Celles-ci, en fournissant un contexte d’interprétation, régulent les commentaires des lecteurs et leur donnent des cadres, nécessairement contraignants, d’intelligibilité. Une telle position anti-essentialiste, au-delà de son iconoclastie joyeuse, permet de repenser autrement la puissance du contexte dans les processus d’interprétation et d’envisager, selon nous, comment peuvent se constituer et s’agencer de singulières communautés d’usage.