Histoire des idées : une certaine idée de l’histoire

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13 décembre 2021

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Gérard Raulet, « Histoire des idées : une certaine idée de l’histoire », Recherches germaniques, ID : 10.4000/rg.6865


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Sollicitée tout autant que contestée par les sciences philologiques – qu’il s’agisse de l’histoire de la philosophie ou des études littéraires –, ainsi que par l’histoire, l’histoire des idées est en apparence une sorte de mixte dont la propre histoire révèle cependant le rôle clef. Lorsqu’on la range dans la ‘civilisation’, pratique propre aux départements de langue et civilisation étrangères, on oublie que ces derniers sont issus de la transformation des chaires de littérature étrangère dont ils ont modernisé la compétence généraliste dans les premières décennies du xxe siècle. À ce moment-là, dans la germanistique naissante, l’histoire des idées a été un temps la discipline englobante et dominante, avant que la spécialisation des savoirs ne la relègue dans la « civilisation ». Elle reste pourtant à la croisée des disciplines – l’histoire de la philosophie, l’histoire littéraire et culturelle, l’histoire des mentalités et des systèmes de savoir. Mais pour jouer ce rôle il faut qu’elle s’interroge sur ses objets, et qu’elle affirme ses pratiques et ses méthodes. Cette interrogation fait apparaître sa spécificité et sa fécondité herméneutique pour la compréhension des ‘archives’ (les systèmes de savoir du passé) et pour le rôle des idées dans les combats intellectuels et idéologiques du présent. Au point de rencontre de l’étude des discours et de l’étude des réalités ‘les stratégies discursives’ sont le véritable objet de l’histoire des idées. On donne ici quelques exemples dont l’actualité est évidente.

Von den philologischen Wissenschaften (Philosophiegeschichte, Literaturwissenschaft) wie von der Geschichte als solcher wird die Ideengeschichte zugleich umworben und in Frage gestellt. Sie erscheint als ein Art Zwittergattung. Im Lichte ihrer historischen Entwicklung wird aber ihre Schlüsselbedeutung offenbar. Wer sie der ‚Auslandskunde‘, wie sie im fremdsprachlichen Unterricht praktiziert wird, zuordnet, vergisst, dass sie aus der Transformation der Lehrstühle für fremdsprachliche Literaturen hervorgegangen ist, deren allgemeine Kompetenz in den ersten Jahrzehnten des 20. Jahrhunderts modernisiert und spezialisiert wurde. Eine Zeitlang avancierte damals die Ideengeschichte im Rahmen der entstehenden Germanistik zu einer umfassenden Disziplin, die literatur-, kultur- und geschichtswissenschaftliche Ansätze vereinigte. Noch heute steht sie am Kreuzungspunkt mehrerer Disziplinen: der Philosophiegeschichte, der Literatur- und Kulturgeschichte, der Geschichte der Mentalitäten und Wissenssysteme. Um die daraus resultierende Schlüsselrolle spielen zu können, muss sie sich aber ihrer Gegenstände und ihrer Methoden besinnen. Die Reflexion darüber lässt ihre Spezifität und ihre Fruchtbarkeit sowohl bei der Erforschung vergangener Wissenssysteme (‚Archive‘) als auch in den intellektuellen und ideologischen Debatten der Gegenwart deutlich erkennen. An der Schnittstelle der Diskursanalyse und der Erkenntnis der Wirklichkeit erweisen sich ‚die Diskursstrategien‘ als ihr eigentlicher Zuständigkeitsbereich. Der vorliegende Text entwickelt diese Auffassung anhand aktueller Beispiele.

The history of ideas is both courted and attacked by the philological sciences (history of philosophy, literary studies) and history as such. It appears as a kind of hybrid genus. In the light of its historical development, however, its key significance becomes evident. Anyone who classifies it as ‘foreign studies’, as practiced in foreign language teaching, forgets that it has arisen from the transformation of the chairs for foreign literatures, the general competence of which was modernized and specialized in the first decades of the 20th century. At that time, in the emerging German studies the history of ideas developed into a comprehensive discipline that united literary studies, culture and history. Even today it stands at the crossroads of several disciplines: the history of philosophy, the history of literature and culture, the history of mentalities and systems of knowledge. In order to play the resulting key role, however, it must reflect on its objects and its methods. Reflection on this reveals its specificity and its fruitfulness both in the research on past systems of knowledge (‘archives’) and in the intellectual and ideological debates of the present. At the point of contact between discourse analysis and the knowledge of reality, ‘discourse strategies’ prove to be its real area of competence. The present text develops this thesis through some significant examples.

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