La crise de la raison économique et la perte de foi dans l’avenir

Résumé Fr En

La théorie économique, qui prétend au statut de science, se veut une discipline de la mesure, mais la réalité économique se caractérise par la démesure, le toujours-plus. Sous couvert de rationalité, l’économie est mue par le désir ; derrière la satisfaction des besoins matériels revendiquée se cache la soif inextinguible d’être reconnu. Suffit-il pour autant de dénoncer la fuite en avant du capitalisme, aveugle aux dégâts qu’il suscite ? En réalité, l’économie a voulu se passer du politique, qui représentait une transcendance extérieure à elle, et elle se retrouve dans l’incapacité de proposer un avenir autre que de croissance et d’expansion, qui ne protège plus les hommes de leur violence ni la nature des atteintes irréversibles qui lui sont infligées. L’appel à la raison est certes nécessaire devant la catastrophe annoncée, mais aussi le rappel que la raison précautionneuse ne suffit pas à fonder la foi en l’avenir.

Claiming to enjoy the status of science, economical theory perceives itself as a discipline of measurement. However, economical reality is rather characterised by excess, the always-more. Under the guise of rationality, economy is moved by desire ; behind the claimed satisfaction of material needs hides the unquenchable thirst of being recognised. But does a simple denunciation of the headlong rush of capitalism suffice, blind as the latter is to the damages it causes ? Economy has in fact wanted to ignore politics, which transcends its own sphere, thus finding itself incapable to propose a future other than growth and expansion, no longer protecting men from their own violence or nature from the irreversible damages that are inflicted upon it. A call for reason is certainly necessary in face of the announced catastrophe, but so is the reminder that cautious reason does not suffice to provide a basis for faith in the future.