31 janvier 2019
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Enora Lessinger, « Genesis of a Poetics of Silence », Sillages critiques, ID : 10.4000/sillagescritiques.7421
Le concept de poétique du silence a acquis une importance centrale dans la recherche littéraire ces dernières décennies, tandis que la narration non fiable telle que Booth l’a définie en 1961 joue un rôle essentiel dans la conceptualisation d’une esthétique du silence. Narration non fiable et poétique du silence sont deux éléments clés de la stratégie d’écriture de Kazuo Ishiguro. Le but de cet article est de monter que la poétique du silence caractéristique du style d’Ishiguro était déjà à l’œuvre au tout début de sa carrière d’écrivain. A cet effet, cet article étudie l’une des premières nouvelles publiées d’Ishiguro, ‘A Strange and Sometimes Silence’ (1981), dans laquelle une narratrice à la première personne évoque des souvenirs de sa vie à Nagasaki pendant la guerre. La narratrice s’avère progressivement d’une fiabilité très limitée, du fait du caractère indicible de son traumatisme. Sa réticence à rapporter certains faits et exprimer ses sentiments est accentuée par la surabondance de détails qu’elle donne sur des sujets plus neutres. Le lecteur implicite est amené à combler les blancs du texte, qui mettent en lumière l’écart entre la narratrice et l’auteur implicite. Cette nouvelle préfigure clairement les romans plus tardifs d’Ishiguro, et aborde des thèmes qui lui sont chers : mémoire, famille, traumatisme et culpabilité, et la bombe atomique comme centre absent. Elle présente également un aperçu très clair de la genèse de son style, centré autour d’une poétique du silence, aussi bien au niveau diégétique que narratologique.