7 novembre 2016
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Van Torhoudt Éric, « L’écrit et la justice au Mont Saint-Michel : les notices narratives (vers 1060-1150) », Tabularia, ID : 10.4000/tabularia.813
Les pratiques montoises en matière d’écrits judiciaires sont comparables à celles des monastères ligériens. La série des notices narratives conservée dans le cartulaire commence avec l’abbatiat de Renouf (1055-1084/1085), connaît son apogée avec l’abbé Bernard (1131-1149) et s’éteint avec la mise en chantier du cartulaire vers 1149/1150. La forme de ces écrits poursuit la tradition diplomatique et historiographique du scriptorium montois et trouva naturellement sa place dans le cartulaire chronique. Les moines y mettent en scène leur autonomie à l’égard des ducs ou des évêques et y soulignent les qualités de certains de leurs abbés. Les sept exemples étudiés ici sont des comptes rendus d’accords qui se désignent eux-mêmes comme des pacta ou des conventiones. Ces textes, assemblant formules diplomatiques, extraits de chartes antérieures et passages narratifs, sont des patchworks alternant les styles subjectifs et objectifs afin de reconstituer un scénario immuable débouchant sur le repentir des laïcs. La procédure exceptionnelle du judiciumn’est qu’un élément d’une négociation qui fait intervenir un large panel d’amis, de parents ou de personnages d’autorité, laïques ou ecclésiastiques, qui ne s’interposent pas pour « dire le droit » ou exécuter une sentence, mais pour valider une preuve écrite ou défendre leurs propres intérêts. L’objectif n’est pas l’application d’une norme juridique, mais l’apaisement des faides et le rétablissement de la concorde par le compromis et la rénovation du lien social. La compréhension de ces textes nécessitent une lecture « entre les lignes » attentive à l’implicite.