30 juin 2022
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David H. Miller, « Shadows, wraiths, and amoebas:the distinctive flops of Anton Webern in the United States », Transposition, ID : 10.4000/transposition.6924
Le 13 janvier 1924, la musique d’Anton Webern est jouée pour la première fois aux États-Unis. Le succès n’est pas au rendez-vous. Au cours des cinq années suivantes, les représentations des œuvres de Webern aux États-Unis sont de plus en plus fréquentes, mais toutes échouent invariablement. Certains critiques qualifient les compositions de Webern de « petites choses étranges », d’autres déplorent que sa musique ne contienne « ni mélodie, ni harmonie, ni rythme ». À défaut d’être progressivement mieux accueillie au cours de cette période, la musique de Webern est cependant de plus en plus connue. Webern acquiert une réputation distincte de celle de ses collègues modernistes grâce à ses compositions singulièrement brèves et silencieuses. Bien que les critiques ne réagissent pas positivement à ces qualités, ils les remarquent, et presque toutes les critiques de l’époque contiennent des phrases telles que « de simples ombres de sons » ou « des enveloppes sonores à peine perceptibles ». Tendance récurrente de la réception de sa musique, les œuvres de Webern sont à plusieurs reprises comparées aux sons d’animaux, d’insectes, de squelettes et même d’amibes. Pourtant, loin de présager un éventuel déclin, les échecs initiaux subis par la musique de Webern aux États-Unis contribuent à établir sa pérennité. La musique a peut-être échoué, mais ce faisant, elle attire l’attention sur le fait que Webern est un compositeur idiosyncrasique qui ne ressemble à aucun autre. Comme l’a affirmé Nicolas Slonimsky, « [t]oute monstruosité musicale n’est pas un chef-d’œuvre musical potentiel, mais ses chances d’en devenir un sont sensiblement meilleures que celles d’une composition respectable de qualité médiocre ». En d’autres termes, l’histoire de la musique de Webern aux États-Unis prouve que ce qui compte quand on fait un flop, c’est la manière de le faire.