2002
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Études françaises ; vol. 38 no. 1-2 (2002)
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Jacques Derrida, « Le parjure, peut-être (« brusques sautes de syntaxe ») », Études françaises, ID : 10.7202/008390ar
S’inscrivant dans le droit fil de textes tels Donner la mort (1999) et Demeure. Maurice Blanchot (1998) où est interrogé, entre autres questions, le statut du pardon, de la promesse, du mensonge et du témoignage, de leur indécidable « vérité » ou partage en régime de fiction littéraire, cette analyse du récit de l’écrivain français et traducteur Henri Thomas aborde la figure de cas complexe du parjure. Se trouvent en effet transposés dans Le parjure certains éléments de la vie de Paul de Man, l’ami qui lie ici tant Henri Thomas que Hillis Miller (à qui ce texte est dédié) et l’auteur lui-même, qui a consacré à de Man plusieurs textes. La lecture se fait tout particulièrement attentive aux brusques sautes de syntaxe du récit, marqué par la (plus-que) figure de l’anacoluthe. Ces ruptures abruptes, tout comme les glissements interrupteurs des mensonges d’Albertine dans la Recherche, infléchissent le récit dans des zones troubles où l’auteur, au sujet du parjure, convoque les essentielles figures du « peut-être » et du « comme si » qui hantent pour lui la fiction de type littéraire. Car si l’on ne sait plus faire la différence, en l’absence de toute preuve, entre « lying » et « storytelling », entre mentir et raconter des histoires, qu’en est-il de la vérité et de ses effets, mais plus encore du secret de la littérature et de la responsabilité qui revient au témoin, cet analyste à qui est confiée l’étrange événementialité de cette fiction réelle ?