2004
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Protée ; vol. 32 no. 3 (2004)
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Josias Semujanga, « La rumeur : Parole fragile et croyance partagée », Protée, ID : 10.7202/011257ar
Cette étude se fait en trois moments. En premier lieu, elle montre les limites des approches béhavioristes et sociologiques abordant la rumeur sous l’angle clinique comme si elle était une pathologie dont il fallait débarrasser la société. Ensuite, elle propose une analyse centrée sur la théorie de l’énonciation à partir des hypothèses avancées par la sémiotique du discours (Bertrand), qui stipulent que toute énonciative individuelle se construit à partir de l’énonciation collective envisagée comme schéma où se trouvent déposés sous formes de sédiments certains énoncés figés comme des stéréotypes et des clichés. Enfin, il en découle une instruction que toute parole a une visée argumentative dont le procès se construit à partir des valeurs partagées entre les interlocuteurs. Car, en convoquant les clichés et les stéréotypes du thésaurus social, la narration d’une rumeur publique vise l’adhésion des interlocuteurs sur la base d’un schéma axiologique binaire marquant, de manière simple et claire, la frontière entre le bien et le mal, l’acceptable et le condamnable. L’analyse illustrera ce cadre théorique par l’étude d’une rumeur spécifique : le « complot tutsi » dans le discours sur le Rwanda avant et après le génocide de 1994.