2009
Ce document est lié à :
Revue des sciences de l'eau ; vol. 22 no. 2 (2009)
Tous droits réservés © Revue des sciences de l'eau, 2009
Yvan Simard, « Le Parc Marin Saguenay–Saint-Laurent : processus océanographiques à la base de ce site unique d’alimentation des baleines du Nord-Ouest Atlantique », Revue des sciences de l’eau / Journal of Water Science, ID : 10.7202/037481ar
Les résultats d’un programme de recherche écosystémique, mené dans le Parc Marin Saguenay–Saint-Laurent, sont résumés pour comprendre les processus fondamentaux responsables de l’existence de ce site traditionnel d’alimentation des baleines, découvert par les baleiniers basques il y a 450 ans. Un ensemble de processus pérennes maintient les proies des baleines agrégées à la tête du chenal principal du plateau continental de l’est du Canada. Quel est-il ?Cette région est le site de la plus riche agrégation de krill documentée à ce jour pour le nord-ouest Atlantique. Les mécanismes responsables sont le pompage, la rétention et la concentration du krill adulte provenant du golfe du Saint‑Laurent par l’énergique circulation estuarienne du Saint‑Laurent. Les courants de marée remontant le long des talus des chenaux et des bancs sous-marins interagissent avec le comportement vertical du krill adulte et le concentrent. Ce processus est plus intense à la tête des chenaux où l’« upwelling » d’origine tidale (remontée d’eau profonde due à la marée) est amplifié. Il est rehaussé par endroits par l’« upwelling » côtier dû au vent. La circulation moyenne transporte les riches essaims de krill le long des rebords des bassins. À l’embouchure de l’estuaire, le krill, concentré à la marge de la grande gyre cyclonique (tourbillon anti-horaire) d’Anticosti, est injecté dans l’estuaire maritime du côté nord, lorsque les conditions de circulation sont favorables. L’étroit courant de talus remontant l’estuaire l’emporte alors vers la zone d’agrégation de krill du parc marin. Des poissons pélagiques fourragers, tel le capelan, se concentrent aussi à la tête du chenal et à l’entrée du fjord sous l’action de l’« upwelling », des courants de marée et des fronts, qui aussi concentrent et augmentent la disponibilité de leurs proies. Ils contribuent à nourrir les baleines et les oiseaux marins.Des caractéristiques océanographiques spéciales, rarement réunies ailleurs, se combinent dans le parc marin pour créer ce site d’alimentation des baleines. Les pressions anthropiques et les changements climatiques sont les principales menaces à sa préservation pour les prochains siècles.