2009
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Études françaises ; vol. 45 no. 2 (2009)
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Fransiska Louwagie, « L’écriture « extime » de Gérard Wajcman : blancs, notes et intertextes dans L’interdit », Études françaises, ID : 10.7202/037849ar
Le présent article propose une analyse de L’interdit, roman (Wajcman, 1985), une oeuvre qui se compose presque exclusivement de notes de bas de page, le corps du texte étant « absent ». Si l’oeuvre semble, d’après ce qu’indique son sous-titre, conclure un pacte romanesque, force est cependant de constater qu’elle participe également d’une écriture autofictionnelle et testimoniale, centrée sur la mémoire de la Shoah. L’interprétation de ce projet littéraire se fait en trois étapes. Dans un premier temps, nous examinerons les fonctions esthétique et phatique des notes : une lecture linéaire et circulaire de celles-ci nous permettra de déceler les grands traits de la trajectoire du protagoniste. Troisièmement, l’analyse des citations intertextuelles (notamment celles tirées de Proust, de Dante et de Flaubert) nous conduira à approfondir les isotopies sémantiques des notes, ce qui confirme que l’apparente dissémination de sens dans L’interdit ne constitue qu’une impression de surface. Finalement, nous montrerons comment L’interdit réalise le projet testimonial que Wajcman définit dans ses ouvrages consacrés à la Shoah et à l’histoire de l’art (L’objet du siècle et Fenêtre,Chroniques du regard et de l’intime). De fait, appartenant lui-même à la deuxième génération de survivants juifs du génocide, l’auteur se construit dans son « roman » une position testimoniale qu’il fonde sur les concepts lacaniens du sujet décentré, de l’objet (a) et de « l’extime ».