1994
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Les Cahiers de droit ; vol. 35 no. 1 (1994)
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Benoît Pelletier, « La clause Canada dans la défunte entente de Charlottetown », Les Cahiers de droit, ID : 10.7202/043270ar
Depuis un certain nombre d'années, le Québec aime se définir comme une société distincte, appelée non seulement à maintenir ses acquis mais aussi à s'épanouir soit en tant qu’État-membre du fédéralisme canadien, soit en tant que pays souverain agissant en son propre nom sur la scène internationale. Bien entendu, ce particularisme tient essentiellement au fait que le Québec est le foyer de la francophonie en Amérique et le principal garant de la survie et de la transmission d'une culture unique, puisant à la fois à la tradition française d'où elle tire son origine et à certaines des valeurs propres au continent au sein duquel elle s'exprime. Mais le Québec se distingue également des autres provinces canadiennes par son régime de droit privé, d'inspiration française et, en conséquence, codifié. Le Québec a maintes fois invoqué dans le passé l'importance qu'il y avait à ce que son caractère distinct soit reconnu en bonne et due forme dans la Constitution du Canada. De nombreux rapports d'enquête sur l'avenir du pays et propositions constitutionnelles ont d'ailleurs fait écho à cette revendication québécoise. C'est le cas notamment pour l'accord du lac Meech et pour l'entente de Charlottetown, deux projets de réforme constitutionnelle qui préconisèrent une reconnaissance du caractère distinct du Québec, mais qui n'aboutirent toutefois jamais. Il faut bien admettre cependant que cette reconnaissance du caractère distinct du Québec, qui était formulée dans les deux propositions en question, s'accompagnait de l'obligation pour les gouvernements du pays d'assurer le maintien des droits des minorités de langue officielle, voire, dans le cas de l'entente de Charlottetown plus particulièrement, de favoriser l’épanouissement de ces mêmes minorités. Si nombre d'articles de nature scientifique ont été consacrés à l'accord du lac Meech, trop peu d'études ont toutefois porté sur l'entente de Charlottetown. Le présent article vise précisément à combler cette lacune, en offrant non seulement un examen de la nature intrinsèque des principes de la société distincte et de l’épanouissement des minorités de langue officielle que l'on retrouvait dans l'entente en cause, mais aussi une analyse de la corrélation qui aurait dû nécessairement être établie entre ces mêmes principes, si l'entente de Charlottetown avait effectivement été «enchâssée » dans la Constitution du Canada. L'auteur examine également la corrélation qui aurait dû être établie entre le principe de l'épanouissement des minorités de langue officielle et certains autres principes énoncés dans la clause Canada de l'entente de Charlottetown.