2002
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Les Cahiers de droit ; vol. 43 no. 1 (2002)
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Geneviève Cartier, « Le principe de précaution et la déférence judiciaire en droit administratif », Les Cahiers de droit, ID : 10.7202/043703ar
Dans l'article qui suit, l'auteure cherche à vérifier la compatibilité des exigences que pose le principe de précaution avec l'attitude de déférence des cours de justice canadiennes à l'égard des décisions des organismes administratifs spécialisés. Le degré de déférence judiciaire repose sur un certain nombre de facteurs, parmi lesquels figurent l'expertise du décideur administratif et la nature discrétionnaire de son pouvoir. Comme le principe de précaution constitue à la base une stratégie de gestion des risques soumise à l'attention des décideurs appelés à prendre position dans un contexte d'incertitude scientifique, l'expertise du décideur pourrait difficilement fonder la déférence judiciaire puisque, dans un tel cas, l'expert atteint les limites de son expertise. Toutefois, dans l'hypothèse où le décideur dispose d'un pouvoir discrétionnaire, cette caractéristique pourrait justifier la déférence et limiter le contrôle judiciaire au caractère raisonnable de la décision rendue. Selon l'affaire Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), le caractère raisonnable d'une décision discrétionnaire repose notamment sur sa compatibilité avec les valeurs qui en sous-tendent la délégation. Or, les valeurs qui sous-tendent toute délégation du pouvoir de rendre des décisions dans un contexte de précaution expriment notamment la nécessité d'élargir l'espace public de dialogue, pour permettre aux citoyens de s'exprimer quant aux mesures à prendre et au niveau de risque qu'ils sont prêts à accepter dans un contexte d'incertitude scientifique. De plus, l'affaire 114957 Canada ltée (Spraytech, Société d'arrosage) c. Hudson (Ville) suggère un certain nombre d'indications selon lesquelles le Canada reconnaîtrait les valeurs que véhicule le principe de précaution. Par conséquent, les exigences de ce principe sont compatibles avec la politique de déférence judiciaire, qui s'appliquera non pas au contenu de la décision prise dans un contexte de précaution mais au processus suivi pour y parvenir