2015
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McGill Law Journal ; vol. 61 no. 1 (2015)
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Chris Hunt et al., « R. v. Spencer: Anonymity, the Rule of Law, and the Shrivelling of the Biographical Core », McGill Law Journal / Revue de droit de McGill, ID : 10.7202/1035388ar
Le jugement récent de la Cour suprême du Canada dans R. c. Spencer s’annonce en tant que décision historique en ce qui a trait au caractère privé des renseignements personnels. La Cour devait décider si un internaute reconnu coupable de possession et de distribution de pornographie juvénile jouissait néanmoins d’un intérêt en matière de vie privée protégé par la Charte concernant ses renseignements d’abonné aux services Internet. C’est d’une seule voix que la Cour suprême a répondu par l’affirmative, principalement parce que de tels renseignements permettent d’identifier un utilisateur s’adonnant à des activités intimes ou confidentielles alors que ce dernier croit agir sous le couvert de l’anonymat. Il s’ensuit que les policiers auront dorénavant à obtenir une autorisation judiciaire avant de recueillir les renseignements d’abonné aux services internet d’un individu—une décision qui contredit ouvertement plusieurs jugements récemment rendus par différentes cours d’appel canadiennes. Dans cette étude, les auteurs soutiennent que Spencer aura probablement un impact significatif, et possiblement transformateur, sur la jurisprudence relative à l’article 8. À leur avis, la reconnaissance par la Cour de « l’anonymat » comme valeur indépendante sous-tendant l’article 8 de la Charte entraîne une notion plus robuste de la vie privée—plus cohérentes avec la doctrine de l’article 8. Les auteurs soutiennent que la reconnaissance d’un droit à l’anonymat pourrait également servir à épauler la primauté du droit en recentrant l’analyse de l’article 8 sur les surveillances indésirables de l’État. En outre, une insistance sur le droit à l’anonymat pourrait entraîner un rôle atténué du dispositif analytique des « renseignements biographiques d’ordre personnel ». Les auteurs concluent leur commentaire en discutant de la décision de la Cour d’admettre la preuve contestée en vertu de l’article 24(2) de la Charte. Ils soutiennent notamment que la Cour a donné trop d’importance à l’incertitude juridique liée à la fouille.