2014
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Ethnologies ; vol. 36 no. 1-2 (2014)
Tous droits réservés © Ethnologies, Université Laval, 2014
Valdimar Tr. Hafstein, « Patrimonial Reflections : From Burning Buildings to Bodies of Heritage », Ethnologies, ID : 10.7202/1037602ar
L’auteur de cet article avance que la montée en puissance du patrimoine culturel représente peut-être l’exemple par excellence d’une réévaluation des pratiques et des objets culturels en fonction de l’opportunité qu’ils présentent pour des objectifs économiques et politiques. Il s’agit de la culture comme matière première : une nouvelle configuration dans laquelle la culture acquiert dorénavant une utilité dans tous les domaines, depuis la création d’emplois jusqu’à la réduction de la criminalité, de l’embellissement des villes grâce au tourisme culturel jusqu’à la résolution des différences et des conflits au sein de la population. Dans ce contexte, le patrimoine procure un langage audible mais flexible pour revendiquer la culture et poser des revendications fondées sur la culture. Il suggère que la Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel de 2003 constitue l’indice d’une réforme des politiques mondiales en matière de patrimoine. Là où les précédents efforts de l’UNESCO se contentaient de documenter et d’archiver les expressions du folklore et de la culture traditionnelle, ses initiatives en matière de patrimoine immatériel visent à assurer la transmission et la persistance des pratiques traditionnelles in situ. Cela exige une intervention directe dans les communautés concernées. L’UNESCO embrigade le patrimoine immatériel en tant qu’outil de préservation des communautés, celles-ci représentant le bien social et moral que l’on pense menacé par la mondialisation. Le patrimoine immatériel apparaît comme un outil de production d’un sentiment fort (mais non exclusif) d’appartenance pour les membres des communautés culturelles au sein des États (et parfois à travers les États). Des groupes de population réifient leurs pratiques et leurs expressions en tant que « patrimoine immatériel » en même temps qu’ils se font les « sujets » de leurs communautés. Le gouvernement peut alors agir dans le domaine social par l’intermédiaire des communautés et au moyen, entre autres, de leurs politiques patrimoniales. L’auteur signale également que nombre de pratiques patrimoniales ont le corps pour objet central – elles font du corps un site de représentation. De fait, le patrimoine immatériel relève en grande partie de la façon dont s’incarne la culture et de la façon dont les corps deviennent dépositaires de la culture.