2015
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Les Cahiers de la Société québécoise de recherche en musique ; vol. 16 no. 1-2 (2015)
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James R. Briscoe et al., « Saint-Saëns, Debussy, and Superseding German Musical Taste in the United States », Les Cahiers de la Société québécoise de recherche en musique, ID : 10.7202/1039617ar
Dans une entrevue publiée dans l’édition du 21 octobre 1908 du Boston Transcript, Claude Debussy répond à une question concernant la vie musicale aux États-Unis. Il déclare : « La caractéristique distinctive d’un pays comme [les États-Unis] est qu’il s’imprègne de toutes les sources […] il est moins tourné vers l’Allemagne que les pays qui n’écoutent que peu ou pas d’autre musique, que ce soit par chauvinisme ou par antipathie ». Cet article examine les rôles de Camille Saint-Saëns (1835-1921) et de Debussy (1862-1918) dans l’évolution des goûts musicaux américains vers le modernisme. Saint-Saëns a dirigé le New York Symphony en 1906, avec au programme son poème symphonique Le rouet d’Omphale, en plus de jouer Africa, Fantaisie pour piano et orchestre avec la même formation. Il s’est ensuite produit à Chicago et à San Francisco, et les critiques pouvaient déjà témoigner de sensibilités artistiques nouvelles, modernes. Frederick Stock, grand défenseur de la musique française, dirige Le prélude à « L’après-midi d’un faune » à Chicago en décembre 1908. Les aspects symbolistes de cette nouvelle musique n’échappent pas au public et aux critiques ; Paul Rosenfeld écrit : « Nous devrions nous tourner vers la France pour trouver le dernier évangile [du nouvel avancement musical] […] Claude Debussy s’est défait des chaînes des conventions anciennes, et pourrions-nous dire qu’il a atteint de nouvelles dimensions musicales ? » Au même moment, la première de Pelléas et Mélisande à New York a marqué au vif la nouvelle écoute. Bien sûr, les sensibilités antigermaniques d’après 1910, résultats de la Première Guerre mondiale, ont facilité un changement d’esthétique durant l’âge d’or aux États-Unis, mais la nouvelle musique française elle-même avait pavé la voie depuis le début des années 1900. En 1923, Carl Van Vechten écrit dans son ouvrage Music after the Great War : « L’invention musicale des deux dernières décennies ne vient pas de l’Allemagne. Elle vient de la France ».