Modèles littéraires de l’art contemporain : Marcelline Delbecq lectrice de Claude Simon ?

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L’influence de Claude Simon sur les artistes contemporains est moins perceptible que celle, entre autres, de Beckett, Duras ou Robbe-Grillet. L’absence de relations directes, malgré les occasions de rencontre, entre Simon lui-même et les artistes des dernières avant-gardes du xxe siècle, explique sans doute en partie le phénomène. Reste que des échos simoniens se font entendre dans le travail de l’artiste française Marcelline Delbecq (en particulier Blackout, 2011). Les similitudes stylistiques (métalepse, flottement énonciatif et ambivalence sémiotique) et thématiques (autour de la production des simulacres) signent l’air de famille derrière l’inversion des enjeux et des effets : chez le romancier, une écriture du monde tel qu’il est, tournée vers l’énigme de la présence et de la représentation ; chez Delbecq, un dispositif de projection fictionnelle, pariant sur l’absence et la ténuité suggestive. Si le sous-texte simonien n’est pas revendiqué par l’artiste, il n’en est pas moins significatif d’une filiation culturelle dont les relais sont à rechercher, d’une manière large et diffuse, dans la réception du Nouveau roman par le minimalisme américain des années 1960, et, d’une manière plus étroite et spécifique, dans une double lecture de Merleau-Ponty, ascendant commun expliquant aussi bien la proximité que les différences entre Delbecq et Simon.

Claude Simon’s influence on contemporary artists is less perceptible than that of Beckett, Duras or Robbe-Grillet among others. The absence of direct relations, despite opportunities to meet, between Simon himself and artists from the 20th century’s last avant-garde movements, no doubt explains the phenomenon in part. The fact remains that there are Simonian in the work of the French artist Marcelline Delbecq (particularly Blackout, 2011). The similarities both stylistic (metalepsis, enunciative hesitation, semiotic ambivalence) and thematic (around the production of simulacra) point to a family resemblance behind the reversal of issues and effects: in the novelist, a writing that deals with the world as it is, oriented to the enigma of presence and representation; in Delbecq, a fictional projection device, gambling on absence and suggestive tenuity. Although the Simonian subtext is not claimed by the artist, it signifies nonetheless a cultural filiation whose relays are to be sought, broadly and diffusely, in the reception of the Nouveau roman by American minimalism in the 1960s, and, more narrowly and specifically, in a double reading of Merleau-Ponty, a common ascendant explaining the proximity of, and differences between, Delbecq and Simon.

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