2017
Ce document est lié à :
Études françaises ; vol. 53 no. 3 (2017)
Tous droits réservés © Les Presses de l’Université de Montréal, 2017
Marie Blaise, « Histoire et littérature : plaidoyer pour « la main du potier sur le vase d’argile » », Études françaises, ID : 10.7202/1042288ar
Les relations complexes, ombrageuses, entre littérature et histoire semblent trouver aujourd’hui de nouvelles perspectives, apaisées, dans le désir revendiqué des historiens d’utiliser une belle langue, d’autoriser des modèles pluriels de récit ou d’assumer une position subjective. L’engouement pour les « écritures du réel » semble lever une autre barrière, d’autant que les historiens s’intéressent désormais aux anonymes, aux victimes, au fait divers même. Mais valoriser les textes de témoignage parce qu’ils seraient une « littérature de non-écrivains » ou insister sur la dangerosité morale de textes, comme Les Bienveillantes de Jonathan Littell, qui racontent l’histoire du point de vue des bourreaux, n’est-ce pas au fond, reprendre la vieille querelle au point même où elle s’alimente depuis que l’histoire s’est constituée comme discipline contre la littérature : la crainte de « l’esthétisation » des processus historiques n’est-elle pas le grand délit du procès en démoralisation que l’histoire fait à la littérature ? Loin de contester cette « démoralisation », l’article revient sur le « siècle de l’histoire » pour tenter d’en mesurer la valeur et peut être la fonction ; pour, autrement dit, tenter de comprendre ce que la littérature fait à l’histoire.