2017
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Les Cahiers des dix ; no. 71 (2017)
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Laurier Lacroix, « De l’illustration à la sculpture : Maria Chapdelaine, source d’inspiration de Suzor-Coté », Les Cahiers des dix, ID : 10.7202/1045197ar
C’est à l’initiative de Louvigny de Montigny (1876-1955) que le roman de Louis Hémon, Maria Chapdelaine, est publié pour la première fois à Montréal en 1916. Le texte passe alors de la forme feuilleton à celle de livre. L’édition est confiée à J.-A. Lefebvre qui mandate le soin de l’illustrer à Suzor-Coté (1867-1939). Les vingt-cinq dessins au fusain reproduits maladroitement par les presses de la firme Godin & Ménard sont d’un intérêt inégal. L’artiste reprend et adapte certaines de ses compositions auxquelles il ajoute quelques scènes caractéristiques du roman, traitées de manière sommaire.La parution en 1921 à Paris du roman lance la carrière internationale du livre qui connaît la célébrité. Fort de sa connaissance de cette oeuvre, Suzor-Coté réalise alors un ensemble de sculptures inspirées de personnages dépeints et de situations décrites. C’est ainsi que les époux Chapdelaine, Maria elle-même, le remmancheur, le médecin de campagne, mais également des scènes montrant le défricheur, l’essoucheur, le portageur et le fumeur prennent forme et seront diffusés dans leur version en bronze.La veine rurale de l’artiste qui était jusqu’alors centrée sur la région d’Arthabaska et certains de ses habitants connaît un renouveau. Le roman permet à Suzor-Coté de combiner sa propre fiction de la vie à la campagne à celle de Hémon. Certaines de ces sculptures, L’essoucheur et Le portageur, par exemple, sont parmi ses meilleures réussites dans ce domaine et contribuent à maintenir sa réputation comme artiste polyvalent sensible à la représentation de la réalité canadienne. À leur tour, les dessins originaux, glorifiés par le succès du roman et débarrassés du traitement que leur avait fait subir l’imprimeur, connaissent une nouvelle vie, une fois acquis par le Musée de la province en 1934. Suzor-Coté peut alors s’appuyer sur l’impact du livre pour faire oublier l’échec de 1916 et ajouter sa contribution à la représentation des personnages de Hémon dans l’imaginaire collectif.